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LA NAVARRE ET LES PROVINCES BASQUES.

chose toute simple et naturelle. Dans les guerres civiles, on ne cède pas volontiers à l’ennemi, même supérieur ; un parti doit être non seulement vaincu, mais détruit. Au contraire, on plie sans peine et sans honte devant une force étrangère, qui rompt la balance, et commande la soumission au plus faible, en lui promettant merci.

Ce rôle, le gouvernement français pouvait se l’attribuer. Mais, incertain entre l’alliance du nord et celle du midi, gêné par des engagemens contradictoires, uniquement occupé du soin de ses intérêts et du maintien de l’immobilité, il n’a pas voulu prendre cette attitude franche et décidée. Un moyen-terme restait du moins : c’était de grossir, par des enrôlemens volontaires autorisés parmi nos troupes, les rangs de la légion auxiliaire française, qui a rendu déjà, malgré son petit nombre, de si éminens services à la cause espagnole. Ce moyen-terme était adopté par le dernier ministère. On était convenu de laisser lever ainsi, dans les régimens français cantonnés au pied des Pyrénées, infanterie, cavalerie, artillerie, un corps de douze à quinze mille hommes, qui, franchissant la frontière sans bruit et par petits pelotons, aurait formé une nouvelle division auxiliaire. Cette force, puissante par elle-même, ralliant autour d’elle l’armée espagnole, rendant quelque vie à la légion britannique, aurait pu finir la guerre par des succès décisifs, de l’énergie et de la persévérance. Le nouveau ministère est venu pour empêcher la réalisation de ce plan, et la volonté qui a prévalu sur l’avis unanime des ministres déchus, ne veut aucune intervention, ni directe, ni déguisée.

Il faut donc chercher ailleurs les moyens de terminer la guerre de Navarre ; et ce serait assurément une bonne fortune pour tous les partis engagés dans la lutte, s’il s’en trouvait un qui satisfît à la fois leur honneur et leur intérêt. Ce serait, aux yeux de la politique et de l’humanité, un véritable bonheur, s’il se rencontrait, pour délivrer l’Espagne de son opiniâtre Vendée, un moyen de pacification plus sûr et plus durable qu’une intervention passagère de l’étranger, un moyen qui coupât la querelle jusqu’aux racines, qui éloignât toute odieuse appellation de vainqueurs et de vaincus, qui désarmât enfin les cœurs et les bras. L’histoire va nous l’offrir, non point l’histoire générale, dans des analogies éloignées et des imitations suspectes, mais l’histoire spéciale du pays, dans des faits irrécusables du temps passé et du temps présent, de manière