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ZOOLOGIE.

font faire à la science un progrès dont aujourd’hui même nous n’osons mesurer toute la portée.

Jusqu’au xviie siècle, et même pendant une grande partie de sa durée, les zoologistes n’avaient porté leurs études que sur les grands animaux. Non-seulement on n’observait pas tous ces petits êtres dont l’immense multitude remplit les classes inférieures, mais encore il existait depuis long-temps parmi les zoologistes comme un accord tacite pour en déclarer la connaissance inutile. Et comment alors eût-on pu pénétrer dans les mystères de leur organisation ? Pareillement des grandes espèces on n’étudiait que les détails principaux dans les rares occasions où l’on songeait à en faire l’anatomie. Guillaume Harvey, dont l’immortalité n’est pas moins méritée par ses beaux travaux sur la génération que par sa brillante découverte de la circulation du sang ; Harvey et quelques autres médecins éminens de divers pays étaient presque les seuls qui eussent cherché dans l’analyse des organes la solution des problèmes que ne résout pas l’examen superficiel. Tous les petits animaux et tout ce qui est petit dans les grands, restait ainsi, à peu d’exceptions près, en dehors de la science, comme si la grandeur matérielle d’un objet était la juste mesure de son intérêt.

Ce fut donc toute une révolution qu’opérèrent Leuwenhoeck d’abord, puis Hartsoeker, lorsque, par l’invention ou plutôt le perfectionnement du microscope, ils appelèrent à leur suite tous les observateurs, non-seulement à l’étude des petites choses, mais même à l’exploration de ce monde invisible dont l’homme avait si long-temps ignoré jusqu’à l’existence. À l’instant même, et dès l’annonce des premiers résultats obtenus, les naturalistes, comme il arrive après toutes les grandes découvertes, se divisèrent en deux camps, les hommes du passé et ceux de l’avenir, les uns aussi empressés de nier le progrès que les autres d’y applaudir et d’y prendre part. ; Mais l’opposition rétrograde et envieuse dut tomber bientôt devant des faits que chacun pouvait voir, pourvu qu’il voulût les regarder ; si le danger des illusions microscopiques fut dès-lors signalé et démontré, l’importance et le mérite des observations bien faites n’en ressortirent que mieux, et leur nombre n’en alla pas moins croissant chaque jour. Aussi, l’application du microscope à la zoologie datait à peine d’un petit nombre d’an-