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ZOOLOGIE.

pour une œuvre aussi nouvelle ; mais que ces esprits légers, toujours prêts à accueillir par la plaisanterie ce qui est au-dessus de leur portée, ne virent dans les magnifiques idées de Lamarck qu’une occasion de faire rire le public aux dépens de cet homme de génie ? Oserons-nous dire surtout que plusieurs savans distingués firent eux-mêmes comme le public, et que quelques autres crurent être clémens en pardonnant à Lamarck sa Philosophie zoologique en faveur de son Système des animaux sans vertèbres ?

Plus heureux que Lamarck, dont la vie s’est écoulée modeste et presque obscure, et qui, sur sa tombe même, n’a pas obtenu justice, Cuvier a vu pendant sa vie, et presque dès sa jeunesse, ses travaux récompensés par une admiration que lui conservera sans nul doute la postérité. C’est presque aujourd’hui un lieu commun que de louer Cuvier. Qui ne sait que son ouvrage sur l’anatomie comparée a fondé cette science, riche avant lui de faits nombreux, mais que nul, si ce n’est quelquefois Vicq-d’Azyr, n’avait encore rendue comparative ? Qui ignore ce que les recherches de Cuvier ont jeté de jour sur l’organisation de ces êtres innombrables que Linnée avait confondus sous le nom de vers ? Et surtout qui n’admire dans Cuvier le créateur de la zoologie fossile ? Ainsi, par un privilége accordé à lui seul peut-être, il était donné à Cuvier d’opérer par chacun de ses ouvrages, une révolution dans la science, et de la faire immédiatement accepter par tous !

x.

L’époque à laquelle ont paru les grands travaux de Cuvier, de Lamarck, des zoologistes que nous avons cités avant eux, et de plusieurs autres hommes éminens dont la science s’honore encore aujourd’hui ; cette époque, l’une des plus mémorables dans l’histoire de la zoologie, est toute récente : un quart de siècle seulement nous en sépare ; et cependant déjà, depuis elle, une ère nouvelle a commencé pour la zoologie, une autre révolution s’est opérée ! Telle est, en effet, la marche constante des sciences : plus une époque est progressive, et plus courte est sa durée ; car plus nombreux sont les progrès accomplis, et plus proches sont les progrès qui doivent naître de ceux-ci.