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Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 10.djvu/166

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REVUE DES DEUX MONDES.

teur de l’Académie de France, n’était cette tendresse et cette douceur d’ame si rare dans les toiles du maître, et qui échauffe les teintes grises et un peu monotones de celles de l’élève.

M. Roger peint avec fermeté et dessine purement. Son tableau de la Recherche du corps de Charles-le-Téméraire après la bataille de Nancy, annonce le sentiment de la composition ; il y a du naturel dans la figure et la pose de la jeune fille qui découvre le cadavre du prince ; mais le sujet, tout en présentant de belles études de corps nus, laisse un peu froide l’imagination du spectateur. Nous ferons le même reproche de froideur à MM. Bezard et Signol. Tous les deux élèves de l’Académie de Rome, et tous les deux dessinateurs corrects et consciencieux, ils ont exposé des tableaux religieux. L’un a pris pour sujet la race des méchans chassant de la terre la justice divine ; l’autre, la résignation et la religion venant au secours d’une famille éplorée ; et pour matérialiser leur idée, pour la rendre palpable, ils ont imité le système des premiers peintres du christianisme, introduit les esprits célestes dans leurs compositions. Il est possible que ce système ait répandu plus de clarté dans les scènes qu’ils ont voulu peindre, mais nous croyons qu’il a jeté aussi de la froideur. Leurs sujets sont devenus symboliques, et Dieu sait quelle foi vive il faut avoir pour supporter le symbole. Du reste, nous reconnaissons qu’il y a de bonnes études et de belles parties dans ces tableaux, et si nous avons dit à ces deux artistes ce que nous pensions, c’est que nous désirons qu’ils ne se jettent pas avec leurs talens et leur sentiment de l’art dans des voies stériles et qui nous paraissent bien difficiles à parcourir aujourd’hui.

Il y a encore une grande quantité d’autres peintures religieuses. Les unes attestent de louables efforts et des études consciencieuses dans leurs auteurs, M. Achille Devéria, Brune, Bigand et Arsenne ; les autres sont des imitations trop naïves des vieux maîtres de l’école romaine et florentine, pour que nous nous en occupions sérieusement. S’il est vrai que les chefs de l’école allemande moderne jugent que la seule manière de traiter convenablement les sujets religieux soit de remonter aux premiers temps de la peinture chrétienne, ils le font sans doute avec un discernement qui les préserve de l’exagération et de l’esprit de système. Ils puisent d’abord aux sources inspiratrices des vieux artistes, à la croyance ;