ii. Géographie. — Trois publications intéressantes rapprochent les différens âges de la science. Les savantes recherches de Joachim Lelewel sur l’état des connaissances cosmographiques chez les anciens, viennent d’être résumées et reproduites chez nous, sous ce titre : Pythéas de Marseille[1]. On sait que l’antiquité, d’ordinaire si crédule, refusait toute confiance à l’aventureux Pythéas. Polybe et Strabon tiennent pour fabuleuses les deux relations qu’il avait rédigées, et qui ne nous sont connues que par les rares citations des écrivains postérieurs. Quoique plusieurs des circonstances qui pouvaient paraître inadmissibles aux Grecs, eussent été confirmées par les découvertes récentes, la critique moderne a conservé des doutes sur la véracité du Marseillais : en France, l’érudit Gosselin s’est montré un adversaire intraitable. M. Lelewel néanmoins entreprend la réhabilitation de Pythéas. Dans son récit, et dans les cartes qui l’expliquent, on peut suivre le voyageur gallo-grec, côtoyant l’Ibérie jusqu’au détroit des Colonnes, doublant le promontoire Sacré (cap Saint-Vincent) et longeant, sur l’Océan, les côtes de la Celtique jusqu’au Finistère. Il quitte alors la route des Carthaginois que le commerce avait déjà attirés jusqu’aux Cassitérides (îles Sorlingues) et au cap Bélérion (côtes de Cornouailles). Il tend au nord jusqu’au détroit et longe la côte orientale de la Bretagne. Parvenu à l’extrémité, il se jette en pleine mer, et après six jours de navigation, il touche ultima terrarum Thule, l’Islande, selon quelques-uns, mais plus probablement l’une des Feroë. Pythéas quitte cette terre sans avoir pu la reconnaître : il regagne le continent européen, et courant vers le nord, il pénètre dans la Baltique, jusqu’à l’embouchure du Tanaïs. Nous croyons que M. Lelewel a définitivement restitué à Pythéas l’honneur de ses découvertes. L’érudition, qu’il a peut-être prodiguée dans son opuscule, doit faire désirer le grand ouvrage qu’il annonce sur la chronologie et la géographie des anciens, objets particuliers de ses études.
Dans une Histoire de la Géographie du nouveau continent[2], M. Alexandre de Humboldt se propose de traiter successivement : 1o des causes qui ont préparé et amené la conquête du Nouveau-Monde ; 2o de quelques faits relatifs à Christophe Colomb, et à Amerigo Vespucci ; 3o des premières cartes du Nouveau-Monde, et de l’époque à laquelle on a proposé le nom d’Amérique ; 4o des progrès de l’astronomie nautique et du tracé des cartes dans le xve et le xvie siècle. Les deux volumes dont nous avons à nous occuper n’abordent que la première section. Il est bien rare que les grandes découvertes résultent d’un effort individuel.