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LA PRESSE FRANÇAISE.

brairie. L’année 1835 donnait le chiffre 82,298. On ne trouve plus, en 1836, que 79,238, c’est-à-dire une baisse de plus de 3,000. La distribution de ces feuilles nous autorise à croire encore que la moyenne du tirage général a subi une grande réduction. En 1835, nous avons évalué la production entière de la librairie à cent vingt-cinq millions de feuilles imprimées ; nous présumons qu’en 1836 elle n’a pas dépassé de beaucoup cent millions ou 200,000 rames.

La différence n’est pas également répartie entre tous les genres de livres : il y a décroissance pour les uns et progression pour d’autres. Mettre les deux groupes en regard, c’est accuser hautement la tendance des esprits. Dans les sciences morales et métaphysiques, les sciences mathématiques et naturelles, les beaux-arts, la littérature classique et l’histoire, on voit les chiffres baisser d’une façon remarquable. Ils se relèvent, au contraire, avec la jurisprudence, la politique et la littérature capricieuse, romans, théâtre, poésie[1].

La plus forte diminution frappe la section théologique ; résultat sans doute inattendu à une époque où le ton général des écrits pourrait faire croire à une restauration religieuse. La théologie n’a produit que 11,508 feuilles-types, au lieu de 14,365, suivant le relevé que nous prenons pour terme de comparaison. Encore ce déficit n’atteint-il que les ouvrages qui ont pour but l’exposition de la science sacrée, ceux qui pourraient agir sur les esprits exercés, dont le retour au catholicisme serait une conquête décisive. La liturgie et les petits livrets de mysticité arrivent positivement au chiffre de l’année précédente. C’est une marchandise dont la fabrication est invariable et le débit assuré. — La philosophie proprement dite ne s’est pas appauvrie pour avoir moins produit matériellement (1,042 feuilles). Ses travaux exclusivement critiques nous ont révélé, dans leur ensemble, une activité inquiète, qui cherche une direction. — Nos grands auteurs, que la presse fait revivre annuellement, ont été un peu négligés. Le nombre des réimpressions classiques s’est réduit d’un tiers (6,284 feuilles, au lieu de 9,188 ). — Nous ne reprocherons pas à l’histoire la baisse d’un dixième qu’elle a également subie, puisque, par compensation, elle nous a fourni presque tous les ouvrages dignes d’examen.

Les indications bibliographiques nous montrent la jurisprudence et la politique administrative en grande faveur, d’où il faudrait conclure qu’on abandonne les théories abstraites pour les expériences pratiques et les essais d’organisation. Les légistes ne se lassent pas d’entasser commentaires sur commentaires ; il n’est pas si petit article des codes qui ne porte en germe plusieurs gros volumes. Quant à la science du gouver-

  1. Nous ne revenons pas ici sur ces ouvrages de littérature que nous avons déjà examinés ailleurs. Voyez les livraisons du 15 octobre et 1er décembre 1836, et du 1er mars 1837.