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HISTOIRE DU BOUDDHISME.

tion, quatre-vingt-seize sectes d’hérésie ; les bouddhistes appellent vues les diverses opinions des hérésiarques. Parmi elles, on retrouve les spéculations métaphysiques les plus raffinées ; dans toutes les religions, la métaphysique est la mère de l’hérésie.

Mais arrivons aux légendes sur Bouddha.

L’histoire réelle du personnage qui a fondé le bouddhisme et lui a donné son nom, est impossible à retrouver sous l’amas de fables dont trente siècles et trente peuples l’ont surchargée. Jamais la biographie ne fut plus complètement ensevelie sous la légende. La science, en rapprochant les traditions indiennes, chinoises, cingalaises, birmanes, japonaises, thibétaines, tartares, sur l’origine du bouddhisme, a pu seulement déterminer avec une grande vraisemblance l’époque de l’apparition de Bouddha, et la fixer vers le milieu du xe siècle avant Jésus-Christ. Le voyage de Fa-Hian confirme cette date, à laquelle d’autres recherches avaient conduit M. Rémusat. Ce voyage change un peu les idées qu’on pouvait se faire sur le lieu d’où le bouddhisme a commencé à se propager. Il place le berceau de cette religion dans l’Inde centrale, au bord du Gange, tandis qu’on l’avait à tort transporté dans le Behar méridional[1].

Il paraît que Bouddha est né aux environs d’Aoude, et, au sud, sa prédication n’a pas passé le Gange.

Voilà à peu près tout ce que l’on peut dire historiquement de ce grand réformateur, dans lequel ses sectateurs ont vu une incarnation divine, incarnation qui a été précédée et sera suivie d’une infinité d’incarnations du même genre, de milliers d’autres Bouddhas.

De plus, les nombreuses nations qui ont adopté le bouddhisme ont prêté à son fondateur des aventures plus extraordinaires les unes que les autres. L’imagination avait un champ presque illimité pour les produire ; car Bouddha a parcouru une série incalculable d’existences. « Le nombre de mes naissances et de mes morts, dit-il, ne peut se comparer qu’à celui des arbres et des plantes de l’univers entier. On ne pourrait compter les corps que j’ai eus. Moi-même je ne puis énoncer les renouvellemens et destructions du ciel et de la terre que j’ai vus[2]. » Ainsi, on n’eut pas à rêver

  1. Introduction, pag. l.
  2. Pag. 68.