Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 11.djvu/377

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.
Séparateur



31 juillet 1837.


Le Moniteur du 18 juillet a enfin publié ce traité de la Tafna, qu’on avait, sans le connaître, attaqué avec tant de violence. Aujourd’hui qu’on le connaît, on ne l’en attaque pas moins ; mais il faut bien se garder de croire tout le mal que l’on en dit, et peut-être même ne faut-il pas s’en étonner. Nous nous sommes fait, tous tant que nous sommes, de si grandes illusions sur Alger ; nous avons là-dessus de si fortes erreurs à reconnaître et à rectifier ; nous avons tant de vérités modestes à apprendre, et tant de mensonges d’amour-propre à oublier ; nous avons tellement sur cette question tout à refaire dans notre esprit, idées et expressions, qu’il ne faut pas trop sévèrement condamner les intelligences qui se cabrent à l’encontre du vrai, du réel et du possible, pour se rejeter par habitude dans le domaine des chimères et de l’impossible où l’on a malheureusement vécu jusqu’à ce jour.

À parler sans métaphore, tout ce que nous pouvons dire du traité conclu par le général Bugeaud avec Abd-el-Kader, c’est que les données générales de la situation ne permettaient rien de plus avantageux, rien de plus brillant. Quand on se place en dehors des faits, des faits présens comme des faits accomplis et irrévocables ; quand on juge des hauteurs de la théorie, oh ! sans doute, on peut secouer la tête et critiquer d’un ton superbe l’état de choses consacré par le traité de la Tafna. Mais un gouvernement a d’autres devoirs. Un gouvernement est obligé de compter avec les faits, le climat, l’éloignement des lieux, les hommes, les ressources actuelles, les besoins possibles de l’avenir. Un gouvernement, dans un pays constitutionnel, doit surtout compter avec les chambres et le budget, deux réalités puissantes qu’il ne méconnaîtrait pas impunément. Eh bien ! quand on se sera mis à sa place, quand on aura établi en conscience un compte sérieux avec tout cela, après avoir fermé soigneusement la porte à l’imagi-