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semble que le Jeu des sept Sages, c’est le Querolus. Le Querolus a été attribué à Plaute, quoique les premiers vers démentent expressément cette assertion. Il appartient au commencement du iiie ou au commencement du ive siècle ; on peut hésiter entre les deux dates, à cause d’une allusion aux Bagaudes révoltés, qui convient à l’une et à l’autre. J’incline pour la seconde, et en ce cas la dédicace à Rutilius peut avoir été adressée à notre Rutilius gaulois, ce qui a été rejeté, sans motif suffisant, par le dernier éditeur du Querolus. Cette circonstance, réunie au passage où il est fait mention de la révolte des Bagaudes au bord de la Loire, nous donne le droit de nous emparer de cet ouvrage comme appartenant à la Gaule.

Il est dit dans le Querolus qu’il est fait pour la table, c’est-à-dire pour être lu ou joué pendant les repas. C’est un usage qui se retrouve ailleurs. Les pièces chinoises sont, en général, destinées à être représentées durant les repas. Le chef de la troupe comique présente au maître de la maison un volume qui contient un grand nombre de comédies pour qu’il choisisse celle qui lui agrée davantage. Celui-ci donne le volume à son voisin, qui le passe au sien, et ainsi de suite, en vertu de la politesse chinoise ; c’est seulement lorsque le recueil, après avoir fait le tour de la table, est revenu au maître de la maison, que ce dernier se décide à désigner la pièce qu’on doit jouer. Cet usage est, comme on voit, tout-à-fait analogue à celui qui consacrait les heures des repas à ces derniers jeux de la dramaturgie latine.

Querolus est, comme son nom l’indique, un grondeur mécontent du sort. Son bon génie lui apparaît sous la forme du dieu Lare, et lui annonce que, par l’influence de son étoile, il sera heureux, quoi qu’il fasse. Ainsi, des bandits pénètrent chez lui pour le voler, et cette visite malintentionnée lui révèle l’existence d’un trésor qu’il possédait sans le savoir. Cette idée d’un homme disposé à se plaindre et content malgré lui est assez piquante. Laissant de côté les détails d’une analyse qui a été si bien présentée[1], nous ne nous occuperons que d’une seule question, qui tient à des questions examinées plus haut, et sur laquelle nous ne sommes pas de l’avis de M. Magnin. Il s’agit de la foi religieuse de l’auteur du Querolus.

Selon M. Magnin, le Querolus est l’ouvrage d’un chrétien qui raille

  1. Revue des Deux Mondes du 15 juin 1835. Ce morceau est extrait de l’ouvrage de M. Magnin sur les Origines du théâtre moderne, ouvrage vivement attendu, dont le premier volume est sous presse.