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Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 12.djvu/367

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L’OPPOSITION ET LE PARTI RADICAL.

que peu nombreux, ou de le subir, en courant le risque de s’aliéner à jamais les opinions tièdes, mais honnêtes, que le voisinage de la république effraie. On a donné un prétexte à la peur.

Le pouvoir avait usé contre l’opposition ses moyens d’attaque, et semblait disposé à une sorte de neutralité. On lui a fourni le thème le plus commode d’agression. Il n’y a qu’à reprendre tous les lieux communs qui ont traîné depuis six ans dans les journaux. On accusera, n’en doutez pas, les signataires du comité et leurs adhérens, de complicité avec l’émeute, ou tout au moins avec le désordre moral, dernière fantasmagorie qui a servi à faire voter les lois de septembre. On dira que MM. Laffitte, Arago et Dupont de l’Eure s’associent aux projets ou aux espérances des éternels ennemis de la monarchie ; on le dira, et le caractère bien connu des honorables députés ne les défendra pas pour tout le monde d’une imputation que leur présence dans le comité semble justifier.

Les auteurs de cette coalition ont réservé, il est vrai, ou ont cru réserver pour chacun d’eux, en y entrant, l’intégrité et la liberté de ses opinions. L’alliance n’avait, dans leur pensée, qu’un seul objet, les opérations électorales ; et, les élections faites, les auxiliaires que l’on appelait devaient être licenciés. Mais autre est la volonté des personnes, autre la force des choses. L’alliance, on le prévoit sans peine, survivra aux circonstances qui l’ont amenée ; un choix libre, quoique peu réfléchi, a formé ces liens, la nécessité les rivera.

Les apologistes du comité ont mauvaise grâce à objecter qu’une association de votes dans la lutte électorale n’est pas une fusion d’opinions ; car, de tous les actes de la vie politique, l’élection est celui qui engage le plus l’opinion du mandataire et celle des commettans. Un député radical qui brigue les suffrages de l’opposition constitutionnelle, contracte, en dépit de lui-même, l’obligation de respecter l’ordre établi. Un député de l’opposition nommé par le concours des radicaux, et qui accepte ce concours, devient leur organe à quelque degré. Le tempérament le plus solide ne résiste pas aux influences d’un milieu délétère ; et si l’on veut conserver sa raison, il ne faut pas aller s’enfermer dans une maison de fous.

En fait, il n’y a pas d’exemple d’une coalition formée en vue des élections, qui n’ait prolongé son existence au-delà ; commencée dans les colléges, elle se continue naturellement dans la chambre, et passe des causes aux résultats. En 1827, les mêmes opinions dont l’alliance avait renversé M. de Villèle, restèrent unies sous le ministère Martignac et signèrent de leurs votes l’adresse des 221 ; en deux ans,