cifique à la fois et féconde. C’est parce qu’elle s’est opérée sans résistance, sans tumulte, sans guerre civile, qu’elle a passé et reste encore tout-à-fait inaperçue.
Chose merveilleuse ! ces idées administratives, économiques, législatives, émanées de la révolution française, c’est le cabinet de Saint-Pétersbourg qui les applique à l’existence politique des deux provinces ! Nous avons énuméré la plupart des nouvelles institutions dont elles furent dotées ; nous ajouterons que l’esprit de sagesse qui présida à l’établissement de chacune de ces institutions, l’habileté avec laquelle on concilia des intérêts qui paraissaient inconciliables, l’art avec lequel on les entoura de l’auréole d’une vieille nationalité, en les rattachant à des institutions antiques qui s’étaient effacées même de la mémoire des habitans, et dont on a exhumé le souvenir, ont été tels que non-seulement les effets matériels et immédiats de la nouvelle constitution, mais aussi ses effets moraux et plus éloignés, ne se sont pas fait attendre. Déjà la vénalité des places et la dilapidation des deniers publics, condamnées en principe, s’effacent de la pratique et de la vie réelle ; il a fallu chercher d’autres moyens d’existence, des moyens plus légitimes. Les boïards, tous propriétaires, commencent à s’occuper de la culture des terres, si négligée auparavant. Les paysans, protégés contre les vexations et la tyrannie, se livrent plus volontiers aux travaux agricoles dont ils peuvent désormais recueillir les fruits. Le commerce se développe ; le peuple ressaisit les armes ; l’esprit guerrier des ancêtres se ranime. Les idées d’ordre et de légalité prennent de la consistance. Une activité, une gravité, inconnues auparavant, se sont assises au milieu de cette administration, naguère sans pensée ni tenue, si frivole, si indolente, si désordonnée, si oublieuse du but sacré de sa mission. La conquête des avantages obtenus fait naître le désir et l’espoir d’en obtenir de plus grands. Nous devons convenir que ces désirs sont encore vagues, que la nouvelle réforme est encore mal comprise dans son esprit et dans son but. Mais que cette constitution prenne racine, que l’on rectifie ce qui s’y trouve de défectueux, qu’on essaie de la compléter selon les besoins naissans ; avant tout, que l’on poursuive l’application ferme de ses dispositions actuelles. Tâche immense et difficile ! Le gouvernement actuel saura-t-il l’accomplir ?