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LAZARE.

Il faut toujours travailler comme avant,
Vivre au milieu des machines cruelles,
Monter, descendre, et risquer en passant
De voir broyer par leurs dures ferrailles,
L’œuvre de Dieu dans mes jeunes entrailles.


LE MAÎTRE.


Malheur au mauvais ouvrier
Qui pleure au lieu de travailler ;
Malheur au fainéant, au lâche,
À celui qui manque à sa tâche
Et qui me prive de mon gain ;
Malheur ! il restera sans pain.
Allons, qu’on veille sans relâche,
Qu’on tienne les métiers en jeu :
Je veux que ma fabrique en feu
Écrase toutes ses rivales,
Et que le coton de mes halles,
En quittant mes brûlantes salles.
Pour habiller le genre humain,
Me rentre à flots d’or dans la main.


Et le bruit des métiers de plus fort recommence,
Et chaque lourd piston dans la chaudière immense,
Comme les deux talons d’un fort géant qui danse,
S’enfonce et se relève avec un sourd fracas.
Les leviers ébranlés entrechoquent leurs bras,
Les rouets étourdis, les bobines actives
Lancent leurs cris aigus, et les clameurs plaintives,
Les humaines chansons plus cuisantes, plus vives,
Se perdent au milieu de ce sombre chaos,
Comme un cri de détresse au vaste sein des flots…

Ah ! le hurlement sourd des vagues sur la grève,
Le cri des dogues de Fingal,
Le sifflement des pins que l’ouragan soulève