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L’UNION DU MIDI.

60,000,000 pour notre commerce total. D’où il faut conclure que la contrebande se fait principalement sur les frontières de ces trois contrées, et que leur association avec la France serait un grand pas vers la destruction de ce commerce immoral.

La fraude est peut-être plus active en Espagne qu’en France. Là, elle livre aux douaniers des batailles rangées, et se cantonne dans certains parages qu’une administration impuissante n’ose pas lui disputer. Un seul fait suffira pour montrer à quel point la contrebande est devenue l’état normal du commerce espagnol. En 1835, la valeur des produits anglais exportés directement en Espagne représentait une somme de 405,065 livres sterl., environ 10,000,000 de francs. Les exportations dirigées sur Gibraltar, qui n’est que l’entrepôt de la contrebande avec l’Espagne, s’élevaient pendant ce temps à 602,580 livres sterl., ou à plus de 15,000,000.

En supprimant les douanes intermédiaires, on ne rendrait pas seulement à l’industrie huit à dix mille préposés, dans la force de l’intelligence et de la santé, mais encore quarante à cinquante mille contrebandiers qui vivent de la fraude comme facteurs ou comme agens du transport. N’est-ce pas là un immense bienfait ? La contrebande est comme le vol, une guerre ouverte contre les lois ; et ici encore, pour rétablir l’ordre, il faut augmenter la liberté.

Mais ce serait peu d’abaisser les barrières qui séparent aujourd’hui les états appelés à faire partie de l’union, si l’on avait la pensée de persévérer dans le système actuel de tarifs et de rendre la frontière commune inaccessible au commerce extérieur. Nous considérons cette association comme l’occasion d’une vaste réforme commerciale qui prendra pour base des droits de douanes, une moyenne de 15 à 20 p. 100. Nous dirons mieux, la réforme commerciale en France n’est possible que de cette manière ; elle se hérisse d’obstacles si l’on veut l’aborder par un autre côté.

Lorsque le gouvernement paraît vouloir traiter avec la Belgique, les exploitans de houille et les fabricans de draps se plaignent d’être sacrifiés à d’autres intérêts ; veut-on chercher des alliances commerciales vers l’Allemagne, s’arranger avec Bade ou avec la Suisse, ce sont les éleveurs de bestiaux, ainsi que les fabricans de Saint-Étienne, de Tarare et de Mulhausen qui se prétendent lésés. À prendre en effet la question par un détail isolé de l’ensemble, la perte, comme le bénéfice, ne rejaillit que sur certaines classes de