La nation voulait alors être monarchique, et la question était de savoir qui serait roi : donnerait-on la couronne au duc d’Orléans en récompense de la conduite de son parti depuis les premiers troubles révolutionnaires ? Appellerait-on un prince étranger ? Ferait-on détrôner le roi par son fils encore enfant ? L’idée de la déchéance du père et de la mère, en laissant le jeune prince, paraissait immorale, et c’était une mauvaise éducation à lui donner. Reprendrait-on Louis XVI, le meilleur prince de sa famille malgré ses torts récens, et, à tout prendre, le meilleur de l’Europe ? Ce dernier parti fut adopté par la presque unanimité de l’assemblée constituante, et après l’éloquent discours de Barnave à l’appui de l’avis des comités réunis, le 15 juillet, Lafayette marqua son assentiment par ces mots :
J’appuie l’opinion de M. Barnave, et je demande que la discussion soit fermée.
L’assemblée ferma la discussion ; le décret qui fut rendu par tous ses membres à l’exception de Robespierre, de Pétion, de trois ou quatre autres, déjoua beaucoup de calculs intérieurs ou étrangers.
On a dit que le roi avait eu des confidens de son départ dans son ministère et dans le côté droit de l’assemblée, ce qu’aucune révélation jusqu’à présent n’a fait connaître ; la malveillance ou l’esprit de parti ont aussi cherché à lui en supposer dans le côté gauche ; on a prétendu que MM. de Lameth, Duport et Barnave, qui, depuis quelque temps, avaient des rapports secrets avec la cour, étaient dans la confidence de cette évasion ; on en a accusé M. d’André, membre influent de l’assemblée ; mais aucune preuve, aucun aveu, ne sont venus corroborer ces vagues assertions. Celles qui ont inculpé à cet égard Bailly et Lafayette sont d’une absurdité encore plus évidente ; car ils étaient naturellement les deux hommes de France à qui la cour devait le moins confier un projet de ce genre dont l’objet était de la soustraire à leur influence et à leur garde, pour la mettre sous la protection