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REVUE. — CHRONIQUE.

a soutenu la discussion avec un talent remarquable ; une loi de travaux publics, qui est, à elle seule, un travail immense ; une loi concernant les travaux à faire à Alger, et l’augmentation de l’armée d’Afrique ; et M. Jaubert demande ce que le ministère a fait dans cette session ? Que ne lui demande-t-il aussi ce qu’il a fait entre les deux sessions, lui, membre d’une législature que le ministère a convoquée après deux ou trois actes politiques non moins importans que les élections générales ? Nous le demandons, à notre tour, à tous les hommes impartiaux, M. Jaubert ne se moque-t-il pas un peu de la chambre et de lui-même en faisant de telles questions ?

Mais l’inévitable grief de M. Jaubert, ce qui domine dans son discours, c’est la rancune qu’il garde à la presse, et notamment au Journal des Débats. Le Journal des Débats s’était exprimé franchement, la veille, sur les tentatives de M. Jaubert et de ses amis pour renverser le ministère ; le Journal des Débats n’avait rien vu de bon, ni pour eux, ni pour le pays, dans l’alliance qu’ils rêvaient avec M. Thiers et le centre gauche ; il avait exprimé nettement sa pensée à ce sujet, et formulé son avis en termes qui avaient produit une vive impression. Oubliant dès-lors le temps peu éloigné où il accourait au Journal des Débats, pour surveiller lui-même l’impression de ses discours, la distribution de ces petites parenthèses si flatteuses (profond silence, sensation, rire général), M. Jaubert attaque avec violence les relations des écrivains et des ministres, et ces chaires politiques où le premier venu peut professer à son aise. Acrimonie injuste, doublement injuste de la part d’un parti qui n’est composé que d’écrivains et de journalistes, journalistes encore à cette heure, après avoir été fonctionnaires et ministres, et à qui la tribune, cette chaire politique si importante, ne suffit pas. M. Jaubert ne devrait-il pas se contenter de la publicité dont il dispose à la chambre, et se trouver heureux de ce que des hommes qui ont plus de talent que lui, plus de science, plus de connaissance des affaires, et une position sociale au moins au niveau de la sienne, se contentent d’exprimer leurs idées dans les journaux, et ne viennent pas lui disputer dans les élections une place qu’ils occuperaient à la chambre avec plus de dignité que lui ?

On ne finirait pas si on voulait réfuter toutes les assertions de M. Jaubert que l’aigreur a conduit jusqu’à parler de ses propres affaires à la tribune nationale, et de quelles affaires encore ! D’un prêt de 1,000 fr. au Journal de Paris, qui a trouvé sans doute qu’une pareille somme n’était pas suffisante pour admettre les élucubrations de M. Jaubert. Le Journal de Paris a répondu noblement à M. Jaubert en lui renvoyant ses 1,000 fr., qu’un acte passé devant notaire l’autorisait à restituer. Le prêt de M. Jaubert avait été fait à raison de onze pour cent, dit le Journal de Paris. Après cela, M. Jaubert aurait, en vérité, bien mauvaise grâce à venir parler pour la conversion des rentes ; car il faut convenir que les rentiers se montrent plus chrétiens que lui dans leur contrat de prêt avec l’état.

Nous n’ajouterons qu’un mot. Dans son discours plus que vif, M. Jaubert, faisant un crime au ministère de son esprit de conciliation, et se montrant fort logique en cela, lui a reproché d’avoir accordé des faveurs à des écrivains qui avaient manqué autrefois au respect dû au roi et à sa famille. Nous ne savons de qui veut parler M. Jaubert, et il eût été plus honorable à lui de s’expliquer davantage. Nous savons seulement que sous ce ministère quelques écrivains avancés dans l’opposition anti-doctrinaire se sont fait un devoir de