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DES
INTERÊTS NOUVEAUX
EN EUROPE
Depuis la Révolution de 1830,
PAR M. L. DE CARNÉ.[1]

Loin d’éprouver quelque embarras à examiner ici les travaux d’un de nos collaborateurs, c’est avec un plaisir sincère que nous nous trouvons appelé à exprimer notre avis sur son talent et ses vues politiques. M. de Carné appartient à cette génération de jeunes hommes qui, sous la restauration, avaient embrassé avec ardeur l’idée généreuse de cimenter l’alliance intime de l’ancienne monarchie et de la liberté nouvelle. Ces jeunes gens n’étaient pas royalistes comme leurs pères, car ils désiraient que l’antique dynastie se prêtât aux mouvemens du siècle. Le dévouement des pères avait été aveugle et absolu, la fidélité des fils était intelligente et conditionnelle.

Voilà ce que ne comprit pas la restauration ; elle ne s’aperçut pas que les enfans de ses plus obstinés défenseurs lui échapperaient si elle ne consentait à les suivre : il fallait, pour ainsi dire, qu’elle se mît à leurs ordres, et non pas eux aux siens. Elle ne pouvait lutter contre la jeunesse libérale qu’avec le secours et les talens de la jeunesse royaliste : la liberté pouvait seule la sauver de la révolution, et, pour résister à une moitié du siècle, il fallait s’assurer de l’autre.

Mais point. La restauration suspectait aussi bien le talent et l’indépendance dans les rangs des jeunes royalistes que dans ceux des li-

  1. Paris, F. Bonnaire, éditeur, rue des Beaux-Arts, 10.