un excellent fragment d’histoire contemporaine ; les évènemens et les hommes y sont jugés avec un esprit ferme. L’écrivain ne descend jamais jusqu’à la satire ; mais il use parfois de cette sévérité qui est la justice et le droit de l’historien. Un morceau sur le Portugal forme un appendice naturel à l’étude sur l’Espagne, et les mêmes qualités s’y font remarquer dans de moindres proportions ; ce qui devait être. L’auteur semble se ranger à l’opinion de ceux qui croient voir dans l’avenir l’union des deux couronnes d’Espagne et de Portugal ; mais cette prévision est exprimée avec une réserve pleine de sagesse.
Constantinople, la Russie et l’Angleterre, tels sont les points importans que touche M. de Carné en terminant son livre. Il reconnaît que la France a agi conformément à ses véritables intérêts en donnant à la Porte une assistance utile, et nous avons vu avec plaisir qu’il ne cédait pas à la manie qui pousse certains publicistes à célébrer, avec un bizarre enthousiasme, la chute imminente de l’empire ottoman. La France doit continuer jusqu’au dernier moment la politique de François Ier et soutenir l’empire turc le plus long-temps possible. Mais la conséquence de cette conduite vraiment raisonnable n’est pas d’associer la France à toutes les transes que fait éprouver la Russie à la Bourse de Londres. M. de Carné a tracé avec une netteté lumineuse la différence de l’intérêt français et de l’intérêt anglais dans cette question. Pour compléter la démonstration, nous dirons un mot de l’alliance anglaise.
Cette alliance sur laquelle depuis huit ans repose la paix de l’Europe, servit de point d’appui au gouvernement de 1830 pour combattre l’entraînement qui sembla quelque temps précipiter la France vers la guerre. Guillaume III trouvait sa popularité dans des hostilités contre la France, et, dès le mois d’avril 1689, il recevait des communes une adresse votée à l’unanimité, où elles l’assuraient qu’il pouvait compter sur l’assistance de son parlement, qui lui fournirait tous les subsides nécessaires. Près d’un siècle et demi après, la maison d’Orléans offrait à la France, comme gage de son adhésion sans réserve aux maximes du gouvernement constitutionnel, l’alliance anglaise qui devait présenter au reste de l’Europe l’union combinée des forces les plus actives du monde politique. Occurrence heureuse pour la dynastie nouvelle de trouver sur le trône d’Angleterre une famille que la même origine avait consacrée à la fin du XVIIe siècle ! La maison d’Orléans pouvait demander sur-le-champ à la maison de Hanovre ce que Guillaume III ne put arracher de Louis XIV, ce que la reine Anne en obtint enfin dans le traité d’Utrecht, la reconnaissance de la dynastie nouvelle qui avait supplanté l’ancienne. Ajoutez cette autre