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REVUE. — CHRONIQUE.

singulièrement la probabilité du succès. Ma seconde raison, c’est la facilité même de l’exécution. En ce point, le roi de Hollande se trouve sans intermédiaire vis-à-vis du gouvernement belge, et comme le recours aux armes est interdit à l’un et à l’autre, tout l’avantage est du côté de la Belgique. Dans la question territoriale, le roi de Hollande s’est long-temps retranché derrière les droits de la confédération germanique, et aujourd’hui qu’il a épuisé ce moyen dilatoire, il peut s’adresser à elle pour être mis en possession des territoires que la confédération et lui ont un intérêt commun à faire rentrer sous sa domination. Mais, dans la question financière, rien de pareil n’est possible ; il n’y a pas à solliciter l’intervention d’un tiers ; il y a un consentement à donner, une nécessité à subir, à moins de rompre encore une fois toute la négociation, de rentrer dans le provisoire, dont on prétend vouloir sortir, de perpétuer les dépenses sous lesquelles on succombe, de ranimer les mécontentemens auxquels on a cédé, de laisser indéfiniment les Belges à Venloo et dans toute la province de Luxembourg ! Si c’est de bonne foi que le roi de Hollande a rétracté ses protestations antérieures contre le traité du 15 novembre, il ne peut se refuser à une négociation que tout le monde juge nécessaire ; et une fois cette négociation ouverte, le résultat n’est pas douteux.

Il suffit, au reste, de jeter les yeux sur le traité pour voir qu’une négociation nouvelle est indispensable dans l’état actuel des choses ; les engagemens qu’il consacre n’existent d’une part qu’entre les cinq puissances respectivement, et de l’autre, qu’entre les cinq puissances et la Belgique. Mais le traité devait être inséré mot pour mot dans l’arrangement définitif entre la Belgique et la Hollande, dont l’acceptation était supposée devoir immédiatement suivre. Or, il serait aujourd’hui impossible d’exécuter cette clause de l’insertion mot pour mot, qui se rapporte à une hypothèse non réalisée. Ceci est surtout important pour la question de la dette, et conséquemment pour celle des arrérages ; et la rédaction des articles 13 et 14 devra être considérablement modifiée. Mais ici, la forme emportera le fond, et il faudra bien à l’occasion des mots aborder les choses, c’est-à-dire examiner jusqu’à quel point la Belgique, obligée, par l’attitude hostile que gardait le roi de Hollande, à entretenir son armée sur le pied de guerre, doit les intérêts de sa part de la dette, à partir du moment où, par sa ratification du traité, elle a mis son adversaire en demeure. Il est certain que la question des arrérages n’est nullement préjugée par le texte du traité, que c’est une question toute neuve à débattre, et que là encore peuvent s’exercer avec avantage pour la Belgique les bienveillans efforts des puissances amies de sa cause. Mais il ne faut pas, monsieur, que la Belgique gâte sa position, embarrasse ses amis, et donne à ses ennemis, si elle en a, la moindre apparence de griefs à faire valoir contre elle.

Je vous ai exposé sincèrement, monsieur, mon opinion sur les droits et les prétentions de la Belgique. Je la crois fondée sur une interprétation exacte des engagemens qu’elle a contractés et que l’Europe a contractés envers elle,