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efforts de Paskewitch se dirigèrent alors vers Erivan, et tout se réunit pour favoriser ses projets. Son artillerie de siége, malgré des difficultés sans nombre, passa heureusement les montagnes de Besobdal ; les provisions destinées aux Persans furent livrées à leurs ennemis par les habitans du pays ; une tentative d’Abbas-Mirza sur le couvent d’Etchmiadzin fut repoussée par le général Krassowski, et plus tard les défections toujours croissantes et la jonction de deux corps d’armée russes, forcèrent ce prince de se retirer à une assez grande distance. Non loin d’Erivan se trouve la forteresse de Serdar-Abad, que Paskewitch vint d’abord assiéger. Le feu fut ouvert le 19 septembre, et l’artillerie, au bout d’une demi-heure, renversa une tour qui dominait la porte, et fit une brèche si considérable dans la muraille, que la garnison effrayée s’enfuit presque tout entière dans la nuit, et que les Russes entrèrent sans coup férir dans la place, où ils trouvèrent dix-sept canons et des munitions considérables. Rien ne pouvant plus faire obstacle au siége d’Erivan, Paskewitch se rendit devant cette ville : le 26 septembre, les batteries furent placées, la tranchée fut ouverte, et les projectiles russes jetèrent le désordre et la terreur dans la place. Le 1er octobre, un régiment de la garde impériale, envoyé en Arménie pour laver dans le sang des Persans la part qu’il avait prise à l’insurrection de Saint-Pétersbourg, monta à l’assaut avec une telle ardeur, que les habitans d’Erivan demandèrent merci et que la garnison mit bas les armes. Elle était forte de cinq mille hommes et avait à sa tête sept khans de distinction, notamment Hassan-Khan, frère du serdar d’Erivan, et l’un des meilleurs généraux du chah. La prise de cette importante place assura aux Russes la possession de toute la province, et fit une grande impression sur l’esprit des Persans, qui, dans leurs chants populaires, l’appelaient la ville imprenable.

Cependant le général prince Éristof, qui occupait la province de Nacktchivan, d’où il observait Abbas-Mirza, pour l’empêcher de secourir Erivan, fit un mouvement en avant vers le midi. Il traversa les défilés de Dorad, et le 3 octobre, il occupa la ville de Marand et les deux routes qui conduisent de là à Khoï, à l’ouest, et à Tauris, au sud-est. La prise d’Erivan avait jeté une si grande terreur parmi les habitans de l’Adzarbeidjan que les habitans de Tauris, tremblant déjà de voir leur ville prise d’assaut, résolurent spontanément de la remettre au pouvoir des Russes. Le prince Éristof en ayant eu avis, et ayant appris en même temps qu’Abbas-Mirza voulait retirer de Tauris toutes ses munitions de guerre et de bouche, s’avança à marches forcées et arriva, le 13 octobre, sur les bords de l’Hadji-