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Page:Revue des Deux Mondes - 1838 - tome 15.djvu/811

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ASCENSION
AU VIGNEMALE.

Le Vignemale est la plus haute montagne des Pyrénées françaises[1] ; sa tête chauve domine le lac de Gaube où elle se mire, et ses flancs déchirés descendent d’un côté dans la vallée d’Ossone, en s’appuyant sur le Malferrat, tandis que de l’autre le pic se dresse de toute sa hauteur au-dessus du port de Panticous, que les habitans de Cauterets suivent pour aller en Espagne.

Ramond essaya plusieurs fois de parvenir à la cime du Vignemale ; mais ses efforts furent infructueux. Il n’est pas à vingt lieues à la ronde de sommités plus âpres, de rochers plus verticaux ; les glaciers qui en protégent les abords sont sillonnés par des crevasses immenses, et les annales des Pyrénées ont enregistré plus d’un évènement sinistre dont les neiges du Vignemale ont été les témoins.

Plus que toute autre ascension, celle du Vignemale peut devenir funeste aux personnes qui la tentent, si la tourmente de neiges vient à les surprendre dans ces hauteurs désolées, là où chaque pas est un calcul, où l’équilibre tient souvent du hasard, dans ces vallées de glaces où, par le plus beau temps, vous ne pouvez faire vingt pas sans vous arrêter pour reprendre haleine. Je plains le pauvre voyageur dont la poitrine, épuisée par la raréfaction de l’air, est soumise encore à l’épreuve d’un vent glacial qui l’étouffe et le gèle, en même temps qu’il l’étourdit et l’aveugle. Il faut avoir parcouru ces hautes régions pour comprendre ce que les battemens rapides du cœur peu-

  1. Le Mont-Perdu et la Maladetta sont en Espagne.