Page:Revue des Deux Mondes - 1838 - tome 15.djvu/881

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
877
REVUE. — CHRONIQUE.

L’amnistie que l’empereur d’Autriche vient d’accorder, à l’occasion de son couronnement comme roi de Lombardie, a causé une grande joie en Italie, et elle fait un pénible contraste avec les nouvelles rigueurs dont la Pologne vient encore d’être l’objet de la part de l’empereur de Russie. Les procédures politiques qui se trouvent pendantes devant les tribunaux sont annulées, les individus détenus pour machinations contre l’état seront mis en liberté, et tous les precetti politiques supprimés. Quant aux contumaces, l’empereur se réserve d’accorder lui-même les permissions de retour qui lui seront demandées, ce qui implique la faculté d’en refuser quelques-unes. Tel qu’il est cependant, cet acte d’amnistie n’est pas moins un acte de politique toute nouvelle de l’Autriche à l’égard de l’Italie, et il n’est pas étonnant qu’on en ait cherché les causes. Quelques journaux l’attribuent à la diminution de l’influence de M. de Metternich, qui ne serait plus, disent-ils, le ministre dirigeant, comme sous François II. Sans discuter ce fait, nous ne croyons pas qu’une mesure telle que l’amnistie ait pu être prise par l’empereur contre l’avis du chancelier de cour et d’état. La conférence ou le conseil privé, où figurent l’archiduc Louis et le comte Antoine de Kollowrath-Liebsteinsky, dont on a parlé comme enlevant les deux tiers des suffrages au prince de Metternich, qui y siége également, compte encore deux autres membres. C’est un conseil où M. de Metternich n’a pas cessé d’avoir la haute main, et l’amnistie autrichienne n’eût pas eu lieu sous sa direction, s’il avait été opposé à cette mesure. C’est parce que M. de Metternich est Autrichien qu’il n’eut pas assisté contre son gré à une détermination de cette importance, qui a sa source dans l’état actuel de l’Italie, bien connu du ministre de l’empereur. Le caractère de l’empereur François a contribué beaucoup plus que celui de M. de Metternich aux rigueurs dont l’Italie était l’objet. On ne peut avoir oublié le discours de François II à une université d’Italie qui lui exhibait ses manuscrits, et ses réponses aux députations des villes. Une haine froide et implacable pour tout mouvement d’idées faisait le fonds du caractère de l’empereur François. M. de Metternich est accessible, au contraire, à toutes les jouissances de l’esprit, et naguère sa politique se bornait à demander gaiement un répit de vingt ans à la révolution française. Nous avons vu, malheureusement, que la rigueur de M. de Metternich peut s’étendre loin quand il le juge nécessaire ; mais M. de Metternich est, avant tout, un homme d’état, et, en cette qualité, il ne saurait vouloir des rigueurs inutiles. Laissons-lui donc la part qui lui revient, sans doute, dans l’amnistie de 1838.

Nous avons sous les yeux un beau et volumineux rapport de M. de Montalivet au roi sur l’état des chemins vicinaux de la France. On ne saurait trop louer la méthode et l’utile développement de cet intéressant travail, qui fait honneur au ministre, dont les connaissances spéciales se retrouvent dans diverses parties de ce mémoire. Nous reviendrons en détail sur ce rapport, qui avance beaucoup l’une des plus intéressantes questions de prospérité publique, et qui montre combien le ministre de l’intérieur actuel comprend les nécessités d’un prompt achèvement de toutes les voies de communication.