Page:Revue des Deux Mondes - 1838 - tome 16.djvu/178

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
174
REVUE DES DEUX MONDES.

avec l’église épiscopale d’Angleterre comme la première condition de successibilité.

Guillaume III, tout entier à la seule pensée de sa vie, l’abaissement de la France, dut se prêter à des passions qui servaient sa politique, quoiqu’elles ne fussent pas dans son cœur. Pendant qu’il obtenait du parlement des adoucissemens successifs aux lois de non-conformité en faveur des dissidens de toute secte, il laissait passer le bill de 1700, lequel impose, à quiconque est né dans la religion catholique, l’obligation, à sa dix-huitième année, de prêter les sermens d’allégeance et de suprématie, et de souscrire, selon l’acte de Charles II, la déclaration contre la transsubstantiation et l’invocation des saints, sous peine de ne pouvoir posséder quelque bien-fonds que ce soit, et de voir sa propriété passer, de son vivant, au plus proche héritier professant la religion anglicane ; statut infâme, auquel les mœurs résistèrent sans doute, mais qui n’en régit pas moins pendant trop long-temps la condition légale des catholiques.

La révolution dynastique avait réglé le droit constitutionnel ; la lutte acharnée de Guillaume III contre Louis XIV fixa, pour tout le cours du siècle qui allait s’ouvrir, le caractère de la politique extérieure, et associa, pour l’opinion populaire, la haine de la France à celle du papisme.

D’un autre côté, la dette publique, qui sortit, sous ce règne, des nécessités même de l’état de guerre, créa dans le pays, en face de la propriété territoriale, une nouvelle nature de propriété et d’intérêt, destinée à exercer une influence considérable sur l’ensemble du mécanisme social. Alors naquirent la banque et le papier de crédit dont un poète a pu dire :

Can pocket states, can fetch and carry kings:
A single leaf shall waft an army o’er,
Or ship off senates to some distant shore
[1].

Après la paix d’Utrecht, et surtout durant le règne habile de George II, le système colonial et le commerce de l’Angleterre se développèrent dans des proportions chaque jour plus vastes. Cependant, quelle que fût la faveur avec laquelle l’Europe accueillait, au XVIIIe siècle, toutes les combinaisons de crédit, faveur qui alla jusqu’à livrer la fortune publique, en Angleterre, aux spéculateurs de la mer du Sud, comme, chez nous, aux charlatans du Mississipi ;

  1. Pope.