peinte en noir, parce que le mur auquel elle s’appuie est peint en blanc. À la grande collégiale de Saint-Quentin, il y a autour du chœur cinq chapelles que M. Vitet a qualifiées avec raison de « ravissantes, d’un goût et d’un dessin tout-à-fait mauresques[1]. » Mais je ne sais si, de son temps, celle du chevet était décorée avec des bandes de papier peint marbré, absolument comme l’anti-chambre d’un hôtel garni, avec un prétendu vitrail en petits carrés de verres bleus et rouges, à travers lesquels les enfans s’amusent à voir trembloter le feuillage d’un arbre planté au chevet de l’église. On n’a pas respecté davantage la curieuse église de l’abbaye de Saint-Michel en Thiérache, que je recommande vivement aux antiquaires qui seront chargés de la statistique si importante du département de l’Aisne : dans une position charmante et presque cachée au bord des vastes forêts qui longent la frontière belge, elle offre le plus grand intérêt par la disposition tout-à-fait excentrique de ses cinq absides, et par son transsept du XIIe siècle. Les moines l’avaient refaite à moitié dans le XVIIe siècle, et avaient plaqué beaucoup de marbre sur ce qui restait d’ancien. Mais il y a deux ans que sa solitude et sa beauté n’ont pu la mettre à l’abri d’une couche générale de jaune, d’orange et de blanc qui en alourdit et altère les proportions. Dans le midi, on doit déplorer les badigeonnages récens de Saint-André-le-Bas à Vienne, de Notre-Dame-du-Port à Clermont, de Notre-Dame d’Orcival en Auvergne, de Saint-Michel au Puy-en-Velay, enfin de la cathédrale de Lyon ; cette dernière œuvre est du fait de M. Chenavard., architecte à qui des juges plus compétens que moi ont déjà imputé l’écroulement de l’ancienne nef de la cathédrale de Belley, ainsi que des restaurations et constructions très affligeantes, à Saint-Vincent de Châlons-sur-Saône. Quant à ce qui se passe dans Paris, j’emprunte l’énergique langage du rapport de M. de Gasparin : « On empâte, dit-il, de peinture, et on cache sous le stuc deux chapelles de Saint-Germain-des-Prés, en attendant qu’on ait assez d’argent pour habiller ainsi l’église entière. On déguise, sous des couleurs vert-pomme et bleu-pâle détrempées dans l’huile, l’église Saint-Laurent, et on en transforme en ce moment les chapelles en armoires. Enfin l’on badigeonne et l’on gratte tout à la fois la grande église de Saint-Sulpice qu’une vieille teinte grise commençait déjà à rendre respectable[2]. »
Ce n’est pas au clergé, c’est au conseil des bâtimens civils, siégeant à Paris, qu’il faut attribuer et reprocher l’odieux système que l’on suit partout à l’encontre des clochers d’églises rurales. Il est à peu près reconnu par tout le monde que les flèches gothiques ou en pointe sont le plus bel ornement des horizons de nos campagnes. Mais malheur à celle qui exige des réparations. Fût-elle la plus antique, la plus noble, la plus gracieuse du monde, point de pitié. Dès qu’on y touche, il faut la remplacer par deux pans coupés, ou par une sorte de calotte ou chaudière. C’est la règle prescrite par le conseil des