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DES SYSTÈMES HISTORIQUES.

blirent leur gouvernement tout-à-fait à part de la nation subjuguée, qui, réduite à un état moyen entre la servitude romaine et une sorte de liberté privée de tout droit politique et en grande partie du droit de propriété, fut destinée par les conquérans au travail et à la culture de la terre. — Les Gaulois devinrent sujets, les Français furent maîtres et seigneurs. Depuis la conquête, les Français originaires ont été les véritables nobles et les seuls capables de l’être. — Tous les Français étaient libres, ils étaient tous égaux et compagnons ; Clovis n’était que le général d’une armée libre qui l’avait choisi pour la conduire dans des entreprises dont le profit devait être commun. — Les Français d’origine, seuls nobles reconnus dans le royaume, jouissaient à ce titre d’avantages réels qui étaient l’exemption de toutes charges pécuniaires, la jouissance des biens réservés au domaine public, l’exercice de la justice entre leurs pareils et sur les Gaulois habitans de leurs terres, la liberté et d’attaquer ou de se défendre à main armée, enfin le droit de voter les lois et de délibérer, sur toute espèce de matière, dans l’assemblée générale de la nation[1].

« Le pouvoir souverain des assemblées nationales ne dura pas d’une manière uniforme ni dans son intégrité ; Charles Martel les abolit pendant les vingt-deux ans de sa domination ; Charlemagne les remit en vigueur et restitua ainsi à la nation française un de ses droits naturels et incontestables. — Pendant et depuis son règne, les assemblées communes de la nation firent les lois ; elles réglèrent le gouvernement et la distribution des emplois civils ou militaires ; elles décidèrent de la paix et de la guerre, et elles jugèrent souverainement les causes majeures, attentats, conjurations, révoltes, et cela à l’égard de toutes les conditions, sans en excepter la royale ni l’impériale. — À la fin du règne de la seconde race, toutes les parties du royaume étant désunies, on ne trouve plus d’assemblées communes, de véritables parlemens. Loin que ce fût un parlement général qui déféra la couronne à Hugues Capet, à l’exclusion de la race de Charlemagne, on peut dire qu’il n’eût pas été possible de transférer la royauté dans une famille qui n’y avait aucun droit, si l’usage des parlemens nationaux avait subsisté[2].

« La police des fiefs établie par Charlemagne fut la seule qui, s’é-

  1. Histoire de l’ancien gouvernement de la France, avec quatorze lettres historiques sur les parlemens ou états-généraux, tom. I, pag. 21, 24, 29, 33, 35, 38, 40, 57, 59, 61, 245, 322.
  2. Ibid. tom. i, pag. 210, 214, 215, 217, 221, 224, 286, 291.