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L’ANGLETERRE DEPUIS LA RÉFORME.

défaillances de l’église épiscopale, a tous les caractères d’un quitte ou double, audacieuse entreprise qui expose en ce moment l’université d’Oxford à de violentes attaques, parties du sein de l’anglicanisme lui-même.

Ne blâmons pas légèrement ces tentatives à l’aide desquelles de nobles esprits essaient de reconstituer par l’étude ce monde de la foi qui leur échappe ; sachons comprendre et ces illusions de l’intelligence et ces profondes souffrances de l’ame que la science ne suffit pas à guérir. L’Angleterre est en ce moment remuée par un souffle religieux ; il en ébranle et soulève le sol, malgré l’industrie qui bruit à sa surface ; et si, dans nos espérances de croyant, et selon nos impressions de voyageur, nous nous trompons en saluant le retour des trois royaumes à l’unité catholique, nul ne saurait contester au moins que le résultat d’une crise aussi grave ne doive exercer une immense influence sur les destinées politiques de la Grande-Bretagne.

Ainsi, pour peu qu’on analyse le grand corps du Church and state, on y découvre de toutes parts des germes de dissolution. Que le parti conservateur renverse les whigs et s’installe à leur place, qu’à force de concessions il se maintienne quelques années au timon des affaires publiques, là s’arrête son avenir, et tout autre lui échappe. Il n’est pas une maxime antique qui ne soit primée par une idée nouvelle, et si ces idées ne prévalent pas encore, au moins ont-elles conquis des positions où elles sont déjà inexpugnables.

Que le parti radical s’irrite de la lenteur d’un mouvement qu’il avait attendu plus rapide, c’est là son rôle et sa mission ; mais nous qui venons d’observer l’Angleterre de 1838 après l’avoir étudiée telle que les siècles l’avaient faite, nous ne saurions méconnaître que ce pays ne soit irrévocablement engagé dans l’évolution sociale parcourue par la France. En matière politique, la barrière de la prescription est brisée, et le droit électoral, assis naguère sur une base historique et immuable, repose aujourd’hui sur une base rationnelle et mobile ; en fait d’administration, le patronage local s’abaisse devant le principe électif se combinant avec le principe centralisateur ; enfin l’église établie, contrainte de supporter la concession du droit commun étendu à toutes les croyances, tend à devenir une minorité en Angleterre même, comme elle l’est depuis long-temps dans l’empire britannique, et sa ruine n’est pas moins avancée par les efforts de ses adhérens que par les attaques de ses ennemis.

L’esprit public est remué aussi profondément que les institutions elles-mêmes. En face de la force hiérarchique qui domine encore le