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Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 17.djvu/246

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REVUE DES DEUX MONDES.

parmi les traditions du paganisme. C’est en cette qualité, et non en qualité d’amplification, qu’il nous est donné par le compilateur de Cordoue, sur l’autorité du célèbre râwî, Abou’Imoundhir Hischâm, plus connu sous le nom d’Ibn-Alkalbiyy. Le tableau double qu’il nous offre de la vieille civilisation arabe, considérée sous deux faces opposées, mais également vraies, me paraît d’ailleurs une bonne introduction à l’étude de la civilisation moderne, qui, sur beaucoup de points, coïncide avec l’ancienne. On sait que les nations de l’Orient se distinguent des autres par la persistance de leurs usages, et il est vrai de dire qu’il y a en Arabie de vastes régions où les mœurs n’ont point changé dans un espace de treize siècles. Je suis convaincu que l’on peut se faire une idée assez juste des Anazèh (au nord de la péninsule) et des Arabes Yâfè (les maîtres actuels du Hadramant) en lisant ce que j’ai retracé de l’histoire des Arabes avant l’islamisme. Ces deux grands peuples Anazèh et Yâfè, derniers représentans de l’indépendance arabe et de la majesté abrahamique, séparés l’un de l’autre par un espace immense et d’innombrables tribus étrangères à leur nationalité, ces deux grands peuples qui s’ignorent l’un l’autre, quoiqu’ils parlent la même langue, sont cependant bien loin d’offrir une ressemblance parfaite ; mais ils n’en sont pas moins très arabes, chacun dans leur sens seulement : — chez Yâfè, c’est le principe vindicatif qui domine, — chez Anazèh le principe généreux. — Quant aux tribus qui ont subi des invasions, et se sont trouvées en contact forcé avec les Turcs, elles sont déchues de soixante pour cent.

J’ai eu pour le texte d’Ibn-Abd-Rabbouh, dont je donne aujourd’hui la traduction, deux manuscrits, dont l’un est ma copie du Kitâb-alickd, et l’autre une compilation de peu de valeur, une sorte d’histoire universelle en un volume, où le texte du Cordouan se trouve inséré en entier. Je me propose de l’envoyer au Journal asiatique, afin qu’on puisse le comparer avec celui de l’exemplaire barbaresque récemment acquis par la Bibliothèque du roi.

En lisant la version suivante, il faut se reporter au commencement du VIIe siècle de notre ère. Des deux personnages que le râwi met en scène, l’un est Khosrou-Parwiz, petit-fils de Khosrou-Anouschirwân, ou Chosroès-le-Grand, roi de Perse ; l’autre est un petit prince arabe nommé Noumân, et surnommé Abou-Ckâboûs, qui régnait sur les tribus de l’est, autant qu’on peut régner sur des Bédouins, mais relevait du roi de Perse. Sa résidence était à Hîrah, ville située au bord de l’Euphrate. Le prince himyarite (ou homérite) dont ces deux personnages font mention, est Sayf, fils de Dhou-Yazan, roi