exceptionnelle, mais si vraie, d’Ourika, ou la ravissante histoire d’Édouard, si souvent relue. Ce monde enchanté a disparu ; et dans ces réflexions qui vont au fond même des choses, au fond des réalités de la vie, et qu’on croirait écrites par un Vauvenargues chrétien, la tristesse seule a demeuré, la vraie tristesse d’une ame qui n’a plus de joie que parce qu’elle peut adorer à leur divine source les perfections demandées vainement à la créature. Pour ceux qui en seraient encore aux illusions, pour ceux-là aussi qui auraient vu se dépeupler le monde idéal du bonheur rêvé, mais qui seraient cependant disposés à chercher des consolations plutôt dans un scepticisme philosophique que dans la piété catholique, ces pages auront un grand charme littéraire et moral. Quant aux ames inclinées vers un christianisme attendri et compatissant, elles les auront vite devinées, sans qu’on les leur recommande. Rien d’ailleurs n’effraie par la sévérité dans ces réflexions religieuses, et le respect de Dieu n’y est pas un sentiment d’esclave, mais une soumission filiale. « La crainte de Dieu, dit Mme de Duras, ne s’inquiète pas de mériter les récompenses, tandis que la peur ne s’effraie que de mériter les châtimens. » Toute la réponse des chrétiens aux stoïques est là. L’austérité disparaît donc ici sous l’indulgence triste des pensées morales, et un certain apaisement tendre, qu’on sent n’être venu qu’après les tempêtes, charme et attire. Cette paix chrétienne si bien décrite a été, on le voit, conquise par les épreuves et les froissemens que les ames d’élite trouvent dans les sentiers de la vie. De là pour le lecteur un intérêt nouveau, augmenté encore par les aimables souvenirs qui se rattachent à Mme la duchesse de Duras. Ces réflexions vraies et souvent profondes s’ajouteront donc désormais dans la pensée à Édouard et à Ourika et éclaireront d’une douce lumière chrétienne ces deux courts et charmans écrits. Il est bien à désirer que les œuvres de Mme de Duras soient enfin recueillies ; c’est une dette littéraire à acquitter envers une mémoire chère, envers une femme qui a su allier dans ses écrits et laisser à son nom cette grâce exquise, rappelée par M. de Lamartine dans la VIIe pièce de ses Recueillemens, et ce courage si noble en sa résignation qui se dévoue dans la vie, comme en une autre Vendée.
Sentence de Jésus-Christ, publiée par M. Augustin Soulié, d’après une édition du XVIe siècle[1]. — Les journaux ont annoncé récemment la vente d’une lame d’airain, trouvée en Italie, et sur laquelle est gravée, dit-on, en caractères hébreux, la sentence prononcée par Pilate contre Jésus-Christ. Ce diptyque serait sans aucun doute un des plus précieux monumens de l’histoire, si l’authenticité en était dûment reconnue. Mais comment arriver à une vérification exacte ? M. Isambert, disposé d’habitude à une certaine vivacité de critique lorsqu’il s’agit du christianisme, a publié, dans le Moniteur, un article étendu sur le jugement rendu par Pilate. Il cherche à prouver par ce travail
- ↑ 1839, in-12, chez Téchener, place du Louvre, 12. — Cette rareté littéraire, tirée à petit nombre, a été réimprimée d’après l’exemplaire de la Bibliothèque royale, dont voici le no pour les bibliographes curieux : 2068, H. (10 G.)