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LES
ÎLES SANDWICH.

PREMIÈRE PARTIE.

Partis de Guayaquil le 14 août 1836, nous arrivâmes en vue de l’île d’Hawaii (Owhyhee), dans la nuit du 29 septembre. Depuis le matin nos yeux se portaient avec impatience dans la direction où nous supposions que l’île devait se trouver. À en croire les relations de tous les voyageurs, nous devions apercevoir, à une très grande distance, le sommet du Mouna Roa, cette montagne dont la cime mystérieuse n’avait depuis lui été visitée par aucun Européen. Il entrait dans les projets de notre relâche d’explorer ses gorges presque inaccessibles, de franchir les neiges qui la couronnent, et d’aller inscrire nos noms sur le pic le plus élevé ; c’était là, dans les derniers jours qui précédèrent notre arrivée, l’objet de presque tous nos entretiens. En vain les relations que nous avions sous les yeux nous citaient-elles les nombreux accidens auxquels nous allions nous trouver exposés ; en vain nous disait-on qu’un naturaliste anglais, M. Douglas, avait péri, dans une entreprise semblable, sous les cornes d’un taureau sauvage ; le danger semblait donner un nouvel attrait à notre expédition scientifique, et nos regards, franchissant les distances, cherchaient à distinguer au milieu des nuages ce théâtre de nos prochaines explorations ; mais un épais rideau de vapeurs le cacha toute la journée à notre vue. Cela, du reste, arrive très souvent : les nuages, chassés presque toute l’année par les vents alisés du nord-est, rencontrent dans leur passage cette muraille formée par le groupe des îles Sandwich, et s’y arrêtent retenus et comme accrochés aux sommets des montagnes. La nuit vint, et, vers une heure du matin, une