les plus brutales. Vous comprenez que pressée par des périls dont elle n’avait pas encore soupçonné la gravité, l’Angleterre pourra se trouver conduite à modifier son organisation politique, ou du moins à renforcer tout son système administratif, en empruntant à ses voisins des institutions et des formes pour lesquelles ses publicistes professèrent long-temps un dédain dont il faudra désormais revenir.
Cependant, au milieu de ces pénibles préoccupations, votre pensée se reporte vers la France avec une sollicitude plus vive encore. Confiant dans ce qui survit chez vous de foi politique et de religieux respect pour l’œuvre des ancêtres, vous pensez que d’immenses ressources sortiront de l’évidence même du péril, du jour où l’existence de la constitution serait manifestement compromise.
Cette sécurité, monsieur, vous ne l’avez pas pour la France. Vous y croyez le gouvernement représentatif exposé à des dangers que l’anarchie parlementaire et le scepticisme national rendent de plus en plus difficile de conjurer. En suivant de près le jeu et l’avortement de tant d’intrigues, en contemplant avec une haute et impartiale sagacité le spectacle de mobilité, d’égoïsme et d’impuissance, si tristement étalé parmi nous, des doutes graves se sont élevés dans votre esprit sur la consolidation de notre établissement politique. En vain cherchez-vous, dans la confusion présente des hommes et des choses, un élément de permanence, une idée respectable et respectée de tous, quelque signe de durée ou quelque gage d’avenir en mesure de résister, ne fût-ce qu’un jour, à l’éternel ouragan qui soulève et roule l’une sur l’autre ces vagues de sable sans consistance et sans repos.
Vous aimez la France, la fécondité de son sol et de son génie, ses mœurs douces et faciles, et cette égalité partout répandue qui semble la consacrer comme le domaine de l’intelligence. Tout fier que vous soyez de la grande nation à laquelle vous appartenez, vous avez foi dans l’initiative réservée à la France sur les destinées de l’humanité ; vous y voyez le creuset où viennent se fondre toutes les idées, pour s’empreindre d’un cachet d’universalité philosophique. Cependant cette puissance pleinement admise par vous dans le passé, vous craignez de la voir s’évanouir dans l’avenir ; inquiet des misères au sein desquelles nous nous traînons si péniblement depuis deux sessions, vous craignez que l’Europe ne doive renoncer à une impulsion qui lui est si nécessaire, et que la France ne descende au-dessous du rôle glorieux marqué pour elle par la Providence. Des luttes politiques abaissées au niveau des plus vulgaires ambitions, des noms propres substitués aux intérêts de parti, des tentatives hardies jusqu’à la té-