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succèdent, comme par une sorte de réaction du mouvement contre le repos, les scènes compliquées et pleines d’une énergique et féroce animation du style toscan proprement dit. Ce style, dans la peinture comme dans la statuaire, et même dans sa période archaïque, vise au mouvement et à l’expression ; la force est son caractère ; il néglige la beauté, ne fait du nu que par occasion, et non comme le style grec à toute occasion, et dans ce nu ce sont surtout les os qu’il accuse de préférence. Les artistes de cette seconde époque se plaisent à représenter des combats ; leurs guerriers, le visage tatoué comme celui des chefs zélandais, la moustache relevée et crispée, sont couverts de pied en cap d’armures travaillées, qui ressemblent singulièrement à celles de nos chevaliers du XIIe au XVe siècle. Ils combattent dans les attitudes les plus bizarres et les plus variées, et se portent de terribles coups de lance et d’épée. Cette époque a, du reste, en tout, une extrême analogie avec notre moyen-âge ; elle succède à une époque d’abstractions mystiques, de symbolisme froid, et se complaît dans l’action, dans la violence même, mettant, il est vrai, dans la représentation de ces scènes les plus emportées une précision voisine de la sécheresse et faisant du mouvement avec raideur. Il n’est pas, comme nous l’avons dit tout à l’heure, jusqu’aux habitudes de ces guerriers qui n’aient de nombreux points de ressemblance avec celles de nos paladins du moyen-âge ; leur passion pour les combats singuliers est la même ; leurs armures avec brassards et cuissards, leurs casques à cimiers élevés, hérissés de pointes, de crêtes et de longues oreilles de fer, sont pareils aux armures et aux casques de nos pères. Comme eux, les héros étrusques ont les armoiries les mieux caractérisées, témoin ce guerrier d’origine sicilienne, sans doute, de l’un des vases du musée du Vatican, qui porte, figurées en blanc sur son bouclier noir, les trois jambes trinacriennes.

Cette époque, comme celle de la statuaire étrusque archaïque, est antérieure à Phidias.

La transition de cette seconde époque à la période grecque est insaisissable, le style grec n’ayant pas détrôné de haute lutte le style toscan, mais lui ayant succédé par suite d’une lente et insensible conquête. Peu à peu les formes deviennent moins anguleuses, les muscles moins carrés, les os moins saillans ; le sujet des compositions s’adoucit et se tempère ; les guerriers perdent de leur turbulence et de leur férocité en même temps qu’ils se dépouillent de diverses pièces de leur armure. Les brassards et les cuissards tombent d’abord ; les visières se relèvent, les cimiers s’abaissent, le casque et