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ceux qu’on mettait dans le milieu et qui étaient les moins habiles, s’appelaient λαυροστάται[1].

Quoique les chants, les danses et les évolutions des chœurs fussent principalement réglés par un joueur de flûte[2], qu’on appelait choraule[3] et que dirigeait originairement le didascale[4], celui-ci, cependant, enseignait les choreutes au son de la lyre. Nous venons de voir Agathon se servir de cet instrument pour exercer un chœur tragique. Il y avait plusieurs raisons de cet usage. La première, c’est qu’on avait coutume d’accompagner de la lyre les vers iambiques, c’est-à-dire la portion du drame qui se déclamait[5], et il se rencontrait quelques morceaux de ce genre dans les chœurs. La seconde, c’est que la lyre était particulièrement commode aux didascales, qui, pour enseigner, avaient besoin de conserver le libre usage de la parole. Aussi, outre le mot χοροκιθαριστής, qu’on trouve dans quelques inscriptions, et qui fut d’abord un des noms du poète, plusieurs monumens nous montrent-ils des auteurs dramatiques assis et jouant de la lyre devant des choreutes ou des comédiens[6].

INSTRUCTION DES ACTEURS. — ORGANISATION DES TROUPES SCÉNIQUES.

Les soins que les poètes de l’antiquité donnaient à l’instruction des comédiens se rapportaient, comme aujourd’hui, à deux objets, la distribution des rôles et les répétitions. Avant de passer à l’examen de ces deux importantes parties de la mise à l’étude, il faut établir quelle était l’organisation d’une troupe scénique à Athènes et à Rome.

J’ai dit que les premiers poètes étaient les acteurs uniques de leurs drames. Thespis et ses émules montaient seuls sur le thymélé pour mêler quelques récits ou épisodes aux chants du chœur, et disputer le prix offert à la tragédie. De là le nom d’ἀγωνισταί que portaient ces premiers poètes-comédiens[7].

Un peu après, Phrynichus et Eschyle se firent assister par un second, et bientôt par un troisième acteur[8]. Ils prirent dès lors le nom de πρωταγωνισταί[9], ou, comme disaient les Romains, d’actores prima-

  1. Poll., lib. IV, § 106. — Phot., pag. 210.
  2. Schol., in Aristoph. Vesp., v. 602.
  3. Boeckh., Inscript., n. 2758.
  4. Xenoph., Memor., lib. III, 'cap. V, § 18.
  5. Plutarch., De music., tom. II, pag. 1141, A.
  6. Raspe, Tassie’s descriptive catalogue, etc., n. 3570, 3615. — Denys le tyran acheta à un très haut prix la lyre d’Euripide. Vit. Eurip., in cod. Havniens.
  7. Poll., lib. III, § 144.
  8. Aristot., Poet., cap. IV, § 16. Vit. Sophocl., pag. 2.
  9. Poll., lib. IV, § 124.