Page:Revue des Deux Mondes - 1840 - tome 22.djvu/540

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
536
REVUE DES DEUX MONDES.

puisse procéder une académie est sans contredit l’élection d’un membre titulaire. Cette élection ne saurait être entourée de trop de garanties, de trop de précautions. Or, avec le système de présentation par les sections qui est adopté dans les académies où ces sections existent, chaque candidat se trouve apprécié d’abord par les hommes de sa spécialité, qui communiquent à leurs confrères le jugement qu’ils ont porté sur le mérite des candidats et l’ordre dans lequel ils croient qu’il faut les placer. Le rapport motivé que présente la section à ce sujet, la discussion qui s’établit sur cette présentation[1], servent à éclairer l’académie, qui vote ensuite en connaissance de cause. Mais là où les sections n’existent pas, il n’y a ni discussion, ni rapport, et chaque membre est forcé, ou de voter un peu au hasard, s’il veut ne s’en rapporter qu’à ses propres lumières, ou de consulter ses amis, dont l’avis n’est soumis à aucune espèce de contrôle. Il peut résulter quelquefois de ce défaut de discussion que les voix soient portées à se grouper par des motifs qui ne sont pas exclusivement scientifiques. D’ailleurs, là où il n’y a pas de sections, les concurrens n’ont pas la même spécialité, et il devient presque impossible de comparer leurs titres. S’il est quelquefois si difficile de choisir à l’Académie des Sciences entre un physiologiste et un anatomiste qui se présentent pour entrer dans la même section, quels motifs aura-t-on à l’Académie des Inscriptions, par exemple, pour se décider entre un orientaliste, un savant qui s’occupe de l’histoire du moyen-âge, et un géographe, qui pourront être candidats en même temps ? Et puis comment un académicien, s’il n’est pas éclairé par une présentation faite par des hommes compétens, pourra-t-il apprécier et comparer des travaux si différens ? La division en sections, qu’il faut surtout respecter dans les élections, me semble être la meilleure garantie des choix de l’Institut. C’est avec autant de peine que de surprise que les savans verraient les académies où les sections sont déjà établies négliger de se recruter, même sous les prétextes en apparence les plus plausibles, parmi les plus fortes spécialités. Mieux vaudrait, à mes yeux, modifier l’organisation de l’académie, changer le nom d’une section, diminuer le nombre des membres qui doivent la composer, que d’y introduire

  1. À cet égard les habitudes de l’Académie des Sciences morales et politiques, qui met un intervalle entre le jour de la présentation et celui de la discussion, me semblent préférables au règlement des académies où la discussion s’établit immédiatement après la présentation, car il peut arriver que tous les membres ne soient pas en mesure de discuter immédiatement et sans préparation le rapport présenté par la section.