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M. Letronne a remplacé M. Daunou aux Archives générales du Royaume, M. Naudet prend à la Bibliothèque royale la place de M. Letronne, et M. Sainte-Beuve succède dans la Bibliothèque Mazarine à M. Naudet. On ne pouvait confier ces services publics à des hommes plus compétens et plus dignes. Qu’on nous permette de nous féliciter en particulier d’un choix qui donne à un esprit éminent, trop enveloppé jusqu’ici dans sa modestie, les moyens de se livrer avec une nouvelle ardeur aux grands travaux que le pays a le droit d’attendre de M. Sainte-Beuve.



Nos soieries, cette branche si importante et si productive de nos exportations, sont reçues en franchise aux États-Unis ; mais elles sont menacées d’être frappées bientôt de droits d’importation, et plusieurs membres du congrès, ont déjà exprimé le désir que le gouvernement exécutif prît cette affaire en sérieuse considération. Ce n’est point qu’ils trouvent qu’il n’existe pas en France d’équivalent à l’avantage dont nos soieries jouissent aux États-Unis ; ils ne peuvent pas ignorer que la convention de 1822 a mis presque toute la navigation entre les deux pays dans les mains des marins américains, et cela est si vrai, que les ports de mer français font chaque année de vives réclamations contre cet état de choses. Mais le trésor américain est hors d’état de subvenir aux besoins du gouvernement ; les revenus de l’Union ont diminué, et, comme la loi de 1833 ne permet pas d’élever les droits sur les articles qui paient plus de 20 pour 100 ad valorem, il devient nécessaire d’imposer ceux qui entrent en franchise. Nous avons, il est vrai, des défenseurs dans le congrès ; ceux qui représentent l’Ouest, le Midi, et qui voient qu’une pareille mesure nuirait à leur coton et à leur riz, élèvent la voix en faveur de nos soieries. Une cause ne se perd pas aisément quand elle est défendue par des hommes comme M. Clay, M. Calhoun et M. Benton, le sénateur de l’état de Missouri, un des hommes les plus remarquables des États-Unis, doué d’une grande éloquence et admirateur passionné de la France. M. Benton a devant lui un brillant avenir, et nous ne doutons pas qu’il ne réussisse un jour à resserrer les liens qui unissent les deux peuples. Mais, nous le craignons, l’éloquence et la raison de ces Américains éminens, et les intérêts même si grands du Midi, ne pourront l’emporter sur les intérêts de l’Est et du Nord, et surtout ils ne pourront faire taire les besoins pressans du trésor américain. Tout ce qu’ils pourront obtenir sera de faire maintenir en faveur des soieries d’Europe le droit différentiel qui frappe celles de la Chine.

Une espérance qu’ils ne s’avouent peut-être pas à eux-mêmes, pousse plu-