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REVUE DES DEUX MONDES.

Jamais roi n’a été aimé comme Guillaume l’a été de ses Hollandais. Jamais la confiance d’un peuple dans les sentimens patriotiques et dans l’habileté du monarque n’a été plus illimitée ni le dévouement plus absolu. Hélas ! il faut bien le dire, tout cela n’est plus. L’arc a été trop tendu ; il s’est brisé. Guillaume s’était laissé induire en erreur par les gouvernemens absolutistes. Il les connaît aujourd’hui et a pour eux, dit-on, tous les sentimens d’un homme qui a été victime de leur politique. Il n’est pas moins vrai qu’aux yeux de la Hollande, Guillaume a manqué d’habileté et de prévoyance.

Les Hollandais sont éminemment des hommes d’ordre et de probité et qui aiment à voir clair dans leurs affaires. Ils portent ce même esprit dans les affaires publiques. Maître absolu des finances, Guillaume a fait d’énormes dépenses et occasionné un déficit dont on ne sait pas encore le chiffre exact ; on parle de 300 millions de francs. La Hollande ne redoute pas cette dette ; mais elle veut connaître au juste l’état de ses finances et la mesure des sacrifices qu’elle doit s’imposer pour cicatriser toutes ses plaies. Bref, elle veut une royauté sérieusement constitutionnelle, des ministres responsables, un budget justifié et discuté, choses que le vieux roi, formé à une autre école, vieilli dans d’autres habitudes, déteste cordialement, et auxquelles son caractère franc et raide ne saurait se plier, et moins encore faire semblant de se plier.

On veut faire de lui un administrateur qui rend ses comptes ; il préfère ne plus administrer, et les Hollandais ne sont pas fâchés de voir passer les affaires en d’autres mains. Enfin, l’attachement du roi pour une dame belge et catholique dont il voulait faire sa femme, a achevé de lui aliéner le cœur des Hollandais. Le divorce entre la Hollande et Guillaume était consommé. Guillaume a eu le bon sens de le comprendre et le courage de le déclarer. On porte la fortune personnelle du vieux roi à 160 millions de francs.


REVUE MUSICALE.

N’admirez-vous pas cet Amphion qui remuait les pierres et bâtissait Thèbes aux sons de sa lyre, ce Chinois Roucy qui apprivoisait les bêtes féroces en jouant de la mandoline, et cet Arabe Ishak qui n’avait qu’à souffler dans sa