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ŒUVRES COMPLÈTES DE PLATON.

logues qui n’avaient pas encore été traduits. Je ne sais pas s’il a réalisé cette promesse ; j’en doute fort, et j’avoue qu’après avoir parcouru son livre, je m’inquiète fort peu de le savoir. À mes yeux, malgré tout ce que Combes-Dounous a pu faire, ces dialogues n’ont jamais été traduits dans notre langue.

Toutes ces traductions partielles, dont quelques-unes sont estimables, ne pouvaient donner qu’une idée bien incomplète de la philosophie platonicienne. Il faut excepter les nombreuses traductions de Grou, et cependant, parmi les dialogues qu’il a négligés, il s’en trouve quelques-uns dont la connaissance est indispensable, si l’on veut connaître véritablement Platon. À coup sûr, on peut voir clair dans la philosophie platonicienne sans connaître l’Erixias, le Sisyphe, le Démodocus, et tous ces petits dialogues sur le juste, sur la vertu, qui très certainement ne sont pas de Platon, et sont à peine dignes de figurer dans la collection de ses œuvres ; mais M. Cousin a poussé le scrupule jusqu’à traduire les ouvrages les plus insignifians, pour peu qu’ils aient été, même à tort, attribués quelquefois à Platon. On en peut dire autant de quelques dialogues, traduits aussi pour la première fois en français, et qui ont plus de valeur que les précédens ; ainsi, ce dialogue si plein de grace, le Charmide, dans lequel on ne rencontre pas une seule discussion vraiment philosophique ; le Cratyle, qui ne renferme guère que des étymologies, et dont la traduction, hérissée de difficultés, présente nécessairement à l’esprit quelque chose de bizarre et d’incohérent, puisqu’il faut toujours prononcer un mot grec, pour donner un sens à la phrase française ; enfin, le Politique, où se trouve, au milieu d’une foule de distinctions sans intérêt, cette célèbre définition de l’homme, un animal à deux pieds et sans plumes, dont Diogène triomphait d’une manière si burlesque, quand il jetait un coq plumé dans l’Académie, en s’écriant : Voilà l’homme de Platon. Diogène avait tort. En donnant cette définition dans le Politique, Platon ne songe pas à définir l’homme, mais à donner un exemple de distinction, et il en donne un qui devient ridicule, séparé de ce qui le précède. Si l’on rapprochait la véritable définition de l’homme, telle que Platon l’aurait donnée, de celle qu’aurait pu faire un cynique, on verrait de quel côté se trouvait la vérité dans toute sa noblesse, et de quel côté l’erreur la plus misérable et la plus dégradante. Le Politique, malgré le mythe sublime qu’il contient, n’est au fond qu’un dialogue très secondaire. Mais le Sophiste et le Parménide, où Platon aborde les questions métaphysiques les plus profondes, sont d’une telle importance que, sans