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DOCUMENS INÉDITS SUR MARIE STUART.

En 1547, la réforme, révolte de l’esprit septentrional contre le Midi, de l’indépendance teutonique contre la formule romaine catholique, avait pénétré en Allemagne, en Écosse, en Danemark, en Suède, en Suisse et en Angleterre. Les nations teutoniques se rattachaient avec ardeur à cette nouvelle prise d’armes contre Rome. C’était le rétablissement de la simplicité du culte, la proclamation de l’indépendance de l’esprit, la revendication de la liberté intellectuelle, l’insurrection évangélique contre l’autorité, la tradition et le pouvoir ; ainsi se satisfaisaient les passions septentrionales. La haine de Rome vivait au fond de ce mouvement, qui plaisait à des peuples rudes, originaux et parlant la langue d’Arminius, heureux de se déclarer une fois encore les ennemis de la langue romaine et des peuples romains. Depuis long-temps, et non sans jalousie, ils admiraient et blâmaient tout le Midi ; ils abhorraient les pompes demi-arabes de l’Espagne, les voluptés de l’Italie et les joyeusetés savantes de la France. Leur protestation contre Rome fermentait dans l’esprit teuton avant d’être dans l’organisation protestante. Mais quand Luther et Calvin eurent sanctionné cette haine en l’appuyant sur l’Évangile, la scission entre le Nord et le Midi fut complète et le déchirement rapide. Le Nord et le protestantisme choisirent pour domaine les vertus simples, le coin du feu, l’amour de la famille, la sévérité des mœurs, l’adoration intime, la prière personnelle, le culte de l’ame, et combattirent la magnificence extérieure du Midi, ses rites traditionnels, ses offrandes populaires et ses sacrifices publics. Schisme incurable. Dans cette marche extraordinaire du Nord contre le Midi, de l’examen contre la foi, de l’analyse contre la synthèse, du jugement contre l’autorité, de la personnalité contre la généralité, de la critique contre la tradition, — marche qui ne s’est pas encore ralentie, — l’Écosse joue, au XVIe siècle un rôle terrible. C’est alors la plus sauvage expression du Nord évangélique. Ce peuple s’avance sous l’étendard de Knox comme un montagnard féodal, à moitie nu et cependant paré, le glaive en main, brisant les symboles matériels et teignant de sang l’Évangile de paix. La pire corruption est celle qu’une civilisation étrangère communique aux nations barbares, corruption à la fois féroce comme la race inoculée et vile comme la race corruptrice. L’Écosse du XVIe siècle, sauvage par son propre fonds, recevait de seconde main les vices de l’Italie, que la France et l’Angleterre lui communiquaient. Elle empruntait à la civilisation du Midi ce qui pouvait lui convenir, ambition, perfidie, usage du poison, quand le fer ne