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LA HOLLANDE.

chaque semaine, les meubles essuyés et frottés chaque jour. Pour plus de propreté, on ne fait pas la cuisine dans le corps de logis habité par la famille, mais dans un petit bâtiment à part. La principale pièce de la métairie est celle qui renferme les richesses du paysan, c’est-à-dire la crème, le beurre, le fromage. Les femmes traient les vaches dans des vases en cuivre étincelans comme l’or ; le beurre se fait dans une tonne, au moyen d’une mécanique mise en mouvement par un cheval. Le fromage se vend par milliers de pièces dans les villes voisines, et par centaines de milliers dans les pays étrangers.

Dans ces habitations de paysans, la forme des vêtemens, les habitudes ont peu changé. Là toutes les occupations de la vie sont indiquées et pour ainsi dire fixées d’avance par l’usage et par la tradition ; chaque jour a son emploi, chaque saison ses fêtes et ses travaux. En été, le paysan se récrée le dimanche à faire trotter ses chevaux, ou à exercer son adresse au jeu de quilles près de l’auberge. En hiver, il patine sur les étangs et les rivières. Les fêtes de famille se célèbrent toujours avec une grande pompe ; on voit encore, dans beaucoup de maisons, une porte d’entrée qui ne s’ouvre que pour les trois grandes solennités de la vie : pour l’enfant que l’on va baptiser à l’église, le jeune homme qui mène sa fiancée à l’autel, et le mort que l’on porte dans sa dernière demeure. Si la fermière devient veuve, ordinairement elle épouse son premier valet de ferme. La proposition de mariage se fait ainsi : le jour où les gages des domestiques doivent être payés, la fermière appelle le valet à l’écart, et lui donne ce qui lui est dû ; le valet refuse, la femme insiste ; si enfin elle le force d’accepter ses gages, c’est un signe qu’elle ne veut pas de lui, et alors il abandonne la maison ; sinon il reste et prend la direction des affaires. Mais plus d’une famille de paysans a, comme en Norvége, une longue généalogie dont elle est toute fière, et ne voudrait pas s’allier à une famille moins ancienne. Dans quelques provinces, les jeunes gens qui font la cour aux jeunes filles vont encore, comme dans le nord de la Suède, passer la nuit avec elles sans qu’il en résulte aucune cause de scandale.

Dans certaines villes, on trouve aussi plusieurs usages anciens qui ont résisté à toutes les révolutions. À Harlem par exemple, lorsqu’une femme accouche, on place sur la porte de sa demeure une rosace en dentelles, toute rose si elle a mis au monde un garçon, rose et blanche si elle est mère d’une fille. Autrefois, cette rosace arrêtait la loi elle-même ; le juge et l’archer ne pouvaient pénétrer dans une maison, tant qu’ils voyaient sur la porte ce symbole des joies et des souffrances