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LES SETTE COMMUNI.

pour n’avoir pas un maître. Ces protecteurs ce furent les dominateurs du moment : tantôt les évêques de Padoue, tantôt les seigneurs de Vérone, les brillans Scaliger, Mastino, Can grande ou Can signore ; une autre fois les Visconti de Milan, qui consentirent à devenir princes suzerains des Sept Communes, les déclarant libres, sous condition toutefois qu’elles remplaceraient le bétail qu’elles envoyaient aux seigneurs de Vérone par une contribution annuelle de 500 livres environ.

La puissance de la république de Venise ayant succédé à celle des Scaliger et des Visconti dans les provinces qui s’étendent entre le Pô, l’Adda et les Alpes, les républicains des Sette Communi adressèrent aux républicains de Venise leurs suppliques accoutumées. Venise se déclara donc leur protectrice, maintint leurs chartes antiques, et leur accorda même de nouvelles franchises[1]. Enfin, Venise détruite et l’Italie conquise tour à tour par la France ou par l’Autriche, nous retrouvons la petite république toujours debout ; ses régens et ses municipalités survivent au doge, aux inquisiteurs d’état et aux conseils de Venise. Ses députés accueillis d’abord à Inspruck, puis à Vienne, rapportent avec eux leurs vieilles chartes approuvées par l’empereur. L’Autriche aime ce qui a duré, les peuples des Sette Communi resteront libres parce qu’ils l’ont été de temps immémorial, parce que d’ailleurs il n’y aurait pas grand profit à les empêcher de l’être ; s’ils subsistent, c’est à force de travail et d’industrie ; ils sont trop occupés pour être turbulens, trop faibles pour être agressifs, trop misérables pour exciter la convoitise. Il n’y a donc nul danger à leur laisser cette ombre d’indépendance dont ils se montrent si jaloux.

Les institutions qui régissent ce petit pays furent dans le principe des plus libérales. C’était la constitution républicaine dans toute sa pureté. Chaque citoyen avait une part de souveraineté, tout individu mâle étant électeur et éligible. Dans chacun des sept districts, l’universalité des citoyens nommait deux représentans formant le conseil de gouvernement ou la régence ; cette régence était renouvelée chaque année ; elle partageait le pouvoir exécutif et administratif avec les conseils particuliers des sept districts, espèces de municipalités qui se réservaient l’administration des revenus locaux. L’Au-

  1. On lit dans la charte d’exemptions et de priviléges concédée, en 417, par le doge Moncenigo aux habitans des Sette Communi, le passage suivant, qui semble justifier leurs prétentions à une haute antiquité : « Ces peuples jouiront des priviléges qui de temps immémorial leur furent attribués par les princes auxquels ils s’étaient soumis. » Il est bon de remarquer que ce diplôme a été rédigé il y déjà quatre cents vingt-quatre ans.