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de planter des arbres devant leurs portes. Si cet usage était généralement adopté, les colonies se trouveraient abritées par d’agréables ombrages qui serviraient en outre à purifier l’air.

Ce n’est qu’à Oustlaba que l’on se rapproche des bords du Kouban. Du côté de la Russie, la rive du fleuve est assez escarpée ; l’autre rive me parut marécageuse ; des roseaux et des joncs s’étendaient à perte de vue. La largeur du Kouban est de vingt à vingt-cinq mètres, le pays ne change pas d’aspect jusqu’à Ekaterinodar. Ce sont toujours des plaines, riches en pâturages, qui ne sont entrecoupées que de quelques buissons peu épais. J’avais devant les yeux les montagnes du Caucase, qui, s’élevant vers le centre, s’abaissent d’un côté vers Vladi-Cawkas, et de l’autre vers la mer Noire. À la distance où j’étais, ces montagnes me paraissaient peu élevées, et je m’étonnai que les Russes ne fussent pas encore parvenus à s’en rendre maîtres. Les seuls obstacles que la nature oppose à l’homme sont des marécages produits par les nombreux torrens ou rivières qui viennent se réunir au Kouban.

Les Cosaques de mon escorte me montrèrent un aoul (village) tcherkesse situé à quelque distance du Kouban. Des arbres couvrent les maisons, que je ne pus distinguer. Ce village est indépendant, et les habitans traversent souvent le Kouban pour enlever des bestiaux ou faire des prisonniers : c’est un des postes les plus avancés des Noutakhaits.

Ekaterinodar est la résidence de l’hetman des Cosaques, le général Zavadosky. J’y remarquai une très grande église, construite il y a près de vingt ans ; elle est toute en bois, ainsi que les autres édifices de la ville. Le général Zavadosky me dit que cette année aucune expédition importante n’avait été entreprise ; les Russes s’étaient contentés de réunir les matériaux nécessaires pour reconstruire les forts détruits par les Tcherkesses en 1840. Les incursions sur le Kouban sont plus rares et occupent moins de troupes qu’il y a quelques années. Des Circassiens isolés cherchent encore quelquefois à surprendre des bestiaux ou des hommes sans défense, et, quand ils ont réussi, s’enfuient aussitôt pour cacher leur butin ; dans les engagemens avec les postes de Cosaques, ils se bornent presque toujours à l’échange de quelques coups de fusil.

Les Circassiens viennent parfois vendre leurs bestiaux au marché d’Ekaterinodar, et prennent en échange du sel et quelques étoffes. Il n’y a aucune régularité dans ces échanges, dont l’importance varie