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aurait tort de songer à la dissoudre. Il vaut mieux pour tout le monde que la session prochaine puisse encore être achevée avec la chambre actuelle.

Si le ministère peut traverser la session, il aura alors les conditions nécessaires pour profiter des nouvelles élections. S’il succombe, il sera par cela même prouvé qu’il n’était pas en état de faire des élections à son profit. Il aurait agité le pays inutilement, et dans un moment où plus d’une circonstance déconseille une dissolution. Au surplus, rien n’annonce que le ministère soit le moins du monde décidé à dissoudre la chambre ; si nous sommes bien informés, il serait au contraire à redoubler d’efforts pour se former dans la chambre actuelle une majorité forte et compacte. Nous avons dit dans la dernière chronique à quelles conditions cette tentative pouvait se réaliser. Ces conditions, le ministère peut-il, veut-il les remplir ?

L’autre point que la dernière session a mis hors de doute, c’est que les travaux entre les deux chambres devront être distribués autrement qu’ils ne l’ont été jusqu’ici. Le ministère paraît avoir pris à cet égard son parti : on assure que, dès le début de la session, les travaux seront distribués de manière qu’il n’y ait de temps perdu ni pour l’une ni pour l’autre chambre. Espérons que d’ici à l’ouverture de la session le cabinet n’aura pas oublié le sort de la loi du recrutement.

On annonce pour l’année prochaine des travaux législatifs d’une haute importance. Il est en effet des intérêts positifs et majeurs que la politique nous a trop fait négliger : nous ne pouvons qu’applaudir à la pensée du gouvernement, si réellement il se décide à saisir les chambres des importans projets qu’il prépare sur le régime hypothécaire, sur les colonies, sur les finances, sur les prisons, sur l’organisation judiciaire, sur l’enseignement.

Nous espérons aussi que M. Humann pourra réaliser l’espérance qu’il nous a donnée d’un budget en équilibre pour 1843 ; ce sera le fait capital de son administration. Que M. Humann ne se décourage pas dans l’accomplissement de mesures nécessaires pour que le trésor ne soit pas privé de ses ressources légales, et pour que les impôts soient également et équitablement répartis. Nous sommes un pays de justice et d’égalité, et nul ne doit se plaindre d’une administration qui ne cherche qu’à connaître les faits, afin que les impôts votés par les chambres soient également payés par tous ceux qui les doivent et soient répartis avec équité. M. Humann a donné à la chambre des pairs d’excellentes explications à cet égard, tout en démontrant en même temps que les finances de l’état n’autorisaient pas les sinistres prévisions de quelques esprits chagrins. Dans deux ou trois ans, il faudra bien se résigner à être armés, approvisionnés, fortifiés et riches en même temps. Que deviendront alors certaines homélies parlementaires ? Elles iront augmenter nos trésors d’éloquence. Est-il bien certain qu’il n’y ait de beau que le vrai ?


V. de Mars.