Page:Revue des Deux Mondes - 1841 - tome 27.djvu/288

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
284
REVUE DES DEUX MONDES.

des temps modernes, celle des cotons, n’est-elle pas appelée dans des pays dont toutes les populations ne portent que des tissus de cette matière !

Au milieu de ce mouvement commercial, la France n’est pas restée en arrière des autres nations. Sans doute elle lutterait difficilement contre l’Angleterre et la Hollande, souveraines dominatrices des mers orientales, mais il reste encore une position à prendre dans ces riches marchés : l’exemple des Américains qui préparent sur plusieurs points une formidable concurrence à l’Angleterre est là pour le prouver. Nos grands établissemens industriels de la Normandie et de l’Alsace tendent depuis plusieurs années à s’y ouvrir des débouchés qui pourront devenir de plus en plus considérables. Parmi nos villes manufacturières, il y a Mulhouse et Sainte-Marie qui exportent annuellement, tant par Marseille, Bordeaux, le Hâvre, que par Rotterdam, plusieurs milliers de pièces de toiles peintes, de calicots et de filés.

Dans l’état actuel de ces relations, dans la prévision de l’avenir qui les attend, est-il besoin d’insister sur l’intérêt qui s’attache à l’étude d’un idiome qui doit en être le principal instrument, et dont l’utilité pratique est attestée par tous les navigateurs et les commerçans qui ont fréquenté les vastes parages où il est en usage ?

À l’aide de cet idiome, il deviendra possible d’apprécier les productions naturelles si riches de ce sol fécond et, je dois le dire, si mal connu, d’acquérir des notions plus exactes sur les goûts des populations qui l’occupent, pour tels ou tels produits de notre industrie nationale. Si les autres nations l’ont emporté sur nous jusqu’ici par les spéculations lointaines, c’est parce qu’elles ont des idées plus arrêtés sur les mœurs, les habitudes, les préjugés et les institutions des peuples étrangers ; idées puisées dans la connaissance des langues et des littératures qui sont partout le reflet de la civilisation. N’est-ce pas d’une étude approfondie des idiomes de l’archipel d’Asie, et des ressources que présentent les pays où on les parle, qu’a jailli la pensée qui a créé Singapore et qui a doté l’Angleterre, dans ces derniers temps du plus bel établissement commercial qu’elle ait jamais fondé ?

Une autre considération domine le sujet qui vient de nous occuper. Depuis la fin du siècle dernier, la connaissance des langues et des littératures orientales a fait les mêmes progrès parmi nous que la civilisation et la puissance des Européens dans l’Orient. L’étude du sanskrit et des autres idiomes de l’Asie méridionale, d’abord