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garius au-dessus de Lefké, à peu près au même endroit où il n’arriva qu’après un circuit considérable.

Tite-Live, qui a décrit fort au long l’expédition du consul Manlius, nous a laissé un monument du plus haut intérêt pour l’intelligence de la géographie ancienne. La résistance désespérée des Gaulois dans les défilés de l’Olympe prouve que leur alliance avec les Asiatiques n’avait pas amorti leur valeur. En suivant pas à pas la marche du général romain au milieu de l’Asie mineure, nous retrouvons quelques-unes des villes indiquées par Tite-Live : ruines désertes et aujourd’hui sans nom qui subsistent encore pour attester combien cette contrée était riche et peuplée lorsque les Gaulois y abordèrent.

En quittant Magnésie, Manlius passa le Méandre à la hauteur de Priène. Il trouva sur l’autre bord le bourg de Hieracomé, lieu inconnu et sans doute complètement anéanti par les atterrissemens du Méandre, qui depuis cette époque a formé un nouveau territoire, converti en lac le golfe de Milet, et réuni à la terre ferme l’île de Ladé, dont on ne peut plus que conjecturer la position. De Hieracomé, l’armée arriva en deux jours à Harpasa en Carie. Ce lieu a conservé son nom, et s’appelle aujourd’hui Harpas-Kalè-Si. Les ruines de la forteresse existent encore, elle est située sur une montagne dont la base est défendue par une rivière qui était le fleuve Harpas, et qui a également conservé son nom (Harpa-Tchai). En quittant ce château, l’armée alla camper à Antioche du Méandre, ville aujourd’hui déserte, et dont les ruines offrent peu d’intérêt. Le bourg voisin porte le nom de Yeni-Cheher (nouvelle ville), parce qu’il a été bâti avec les débris de la ville ancienne. Les habitans de Tabœ de Pisidie, ville populeuse et forte qui commandait une plaine étendue et appuyée aux contreforts septentrionaux du Taurus, ne voulurent pas permettre le passage aux armées coalisées. Ils marchèrent contre les Romains, et attaquèrent en plaine des ennemis qui avaient une cavalerie bien montée. Les Pisidiens furent mis en déroute, et la ville de Tabœ en fut quitte pour payer 25 talens (110,000 francs), et dix mille medimnes (50,000 boisseaux) de blé. L’ancienne Tabœ est remplacée par la ville moderne de Daouas. La belle plaine de Daouas produit en abondance du blé et du coton. Ces cantons ne sont guère peuplés, mais le territoire est fertile et bien arrosé. Les villages environnans sont presque tous situés sur l’emplacement de quelque station ancienne. Le fort appelé Gordio-Teichos se trouvait sans doute au village de Kizilgi-Buluk ; au moins les distances données