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qu’à cette condition que le ministère peut surmonter les difficultés de la session, et obtenir dans la lutte parlementaire une victoire qui le consolide.

Dès-lors on comprend qu’il cherche dans l’intervalle à rallier tout son monde et à resserrer les liens qui lui attachent les diverses factions des chambres qui ont voté avec lui à la session dernière. On comprend également que tous ceux qui ont rompu sans retour avec l’opposition, et qui ont d’ailleurs la conviction de ne pouvoir la combattre avec succès que sous la conduite du ministère et à l’aide de ses forces, préfèrent, ne fût-ce que comme pis-aller, une alliance plus intime avec le cabinet au danger d’une défaite de leur parti. Les intérêts sont clairs. Restent les préventions, les vanités, les passions ; elle sont moins faciles à manier, à concilier. La discipline des partis est chose inconnue chez nous. Nous n’osons rien prédire ; nos prévisions seraient peu rassurantes.

Disons seulement que nous avons toujours reproché comme une grave erreur à nos hommes politiques, à tous ceux qui ont joué dans le pays un rôle éminent depuis 1830, leurs divisions et leurs querelles, querelles et divisions fondées en réalité sur des motifs que l’histoire ne prendra guère au sérieux. Dans cette conviction, nous applaudirions toujours à tout arrangement honorable qui mettrait fin à des séparations et à des luttes qui n’ont eu d’autres résultats que d’affaiblir le gouvernement du pays et de lui imprimer des mouvemens irréguliers et désordonnés.

Le public s’est fort occupé ces derniers jours de notre flotte de la Méditerranée. Le fait le plus remarquable nous paraît être l’envoi d’un renfort de deux vaisseaux de ligne à la division de Tunis sous les ordres de M. Leray. La Porte, sous le prétexte de je ne sais quels démêlés avec le bey de Tunis, a manifesté l’intention de le renverser et de le remplacer par un homme à sa dévotion, c’est-à-dire à la dévotion de ceux qui donnent à la Porte, si faible, si impuissante, si incapable d’administrer même ses possessions directes, ces conseils belliqueux, et qui lui inspirent la pensée d’une expédition contre une régence barbaresque. La vérité est qu’on voudrait établir à Tunis un gouvernement hostile à nos possessions d’Afrique, un gouvernement qui pût fournir à nos ennemis des armes, des secours de toute espèce, au besoin un asile, et en cas de succès un allié déclaré. La France a déjà fait connaître qu’elle ne permettra pas à Tunis une révolution à main armée, faite uniquement en haine des intérêts français. Le cabinet du 29 octobre n’est pas moins explicite et moins ferme sur cette question que ses prédécesseurs. Le capitaine Leray est chargé de veiller dans la rade de Tunis aux intérêts français. Tahir-Pacha paraissant vouloir s’approcher de la régence avec une escadre assez considérable, notre division a été renforcée pour toutes les conjonctures possibles. M. Leray a reçu des instructions précises, positives. Tahir-Pacha ne fermera pas l’oreille à de sages conseils ; il n’oubliera pas le canon de Navarin.

L’affaire de l’îlot del Rey, dans les Baléares, pourrait donner une singulière idée de l’administration espagnole. Le gouverneur de Minorque annonce à notre vice-consul qu’il a reçu de Madrid l’ordre de s’entendre avec lui sur