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REVUE. — CHRONIQUE.

des conditions toutes différentes, et si leurs querelles avec l’Angleterre ne se terminent pas, comme il faut l’espérer, par une transaction honorable, ils peuvent, d’un jour à l’autre, se voir entraînés à d’énormes dépenses. Dans cet état de choses, il peut facilement arriver que le gouvernement de l’Union, sollicité d’un côté par certains intérêts, par ces intérêts qui ne sont pas seulement égoïstes en Europe, mais partout, et poussé de l’autre par le besoin d’un plus large revenu, se détermine, sur l’exemple des états européens, à quitter les principes de la liberté commerciale pour ceux du système mercantile, du système protecteur. Déjà il est question d’imposer aux produits étrangers, ou à quelques-uns de ces produits, un droit supérieur à 20 pour 100. Ce serait évidemment un pas décisif dans la carrière prohibitive. Nous ne dirons pas que les États-Unis n’aient point le droit de faire chez eux, en tant qu’aucun traité ne s’y oppose, ce que font tous les jours les puissances européennes. Certes, si l’Union veut se préparer les embarras, les difficultés, les catastrophes, auxquels sont exposés les grands états de notre continent, nul n’a le droit de les retenir sur cette pente funeste. Seulement il est permis de remarquer que les conséquences en seraient plus fâcheuses encore pour un état fédératif que pour un état unitaire, les intérêts rivaux ne s’y trouvant pas également contenus, l’autorité centrale y étant toujours faible et livrée à toutes les agitations des partis. Le système protecteur a été, il est encore en Europe la cause principale de grands désordres économiques et moraux ; il ne tarderait pas à devenir en Amérique une cause irrésistible de rupture entre les diverses parties de l’Union. N’oublions pas que cette Union est d’hier, et que, pour plusieurs des états qui la composent, le ciment historique qui seul forme la véritable unité commence à peine à se former.

Nous ne pouvons qu’applaudir au projet de loi que M. le ministre de la marine vient de présenter à la chambre des députés, et qui a pour but l’augmentation de nos forces navales à la vapeur. Nous voyons avec plaisir le gouvernement ne pas oublier que la marine militaire est aujourd’hui plus que jamais un élément essentiel de notre puissance nationale. Les chambres entreront sans doute dans la pensée du gouvernement et lui alloueront tous les fonds nécessaires. C’est là la meilleure réponse qu’on puisse faire aux observations et aux objections, l’un ou l’autre, peu importe.

Les discussions politiques paraissent avoir épuisé nos hommes parlementaires. Un calme profond a succédé à une agitation sans résultats. Après avoir consacré une grande partie de la session à des débats plus éclatans qu’utiles, voudra-t-on enfin discuter sérieusement les lois que réclament nos plus chers intérêts et qui sont nécessaires au développement de la prospérité nationale ? On peut le désirer, mais à peine ose-t-on l’espérer. La question électorale préoccupe vivement les esprits. On songe quelque peu aux affaires, beaucoup aux élections. On redoute tout ce qui, de près ou de loin, pourrait venir déranger la situation du candidat vis-à-vis de ses commettans. Au fait, si le budget était voté, on ne demanderait pas mieux que de laisser toutes choses in statu quo ; car si un projet est discuté, par exemple celui