Page:Revue des Deux Mondes - 1842 - tome 29.djvu/843

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
833
LETTRES DE CHINE.

qu’il avait d’abord proposées, la remise du matelot qui avait commis le meurtre du 7 juillet, l’entrée des navires à Whampoa, et la signature de l’engagement ou le départ des navires dans l’espace de trois jours, sous peine de destruction.

Le 26 octobre, M. Elliot annonça à ses compatriotes que, la convention ayant été violée par les autorités chinoises, il était urgent que tous les navires anglais se rendissent à l’ancrage de Tong-koo (également dans les eaux extérieures de la rivière de Canton), l’ancrage d’Hong-kong étant exposé à une surprise.

Le 28 octobre, la scène changea de nouveau. Les négociations firent place à des hostilités ouvertes. Vous remarquerez, monsieur, tous ces changemens à vue sans résultat, ces négociations qui ne produisent aucun effet, ces combats sans autre profit que le massacre de quelques Chinois, et, quand on songe que cet état de choses dure depuis plus de deux ans, on est tenté de se demander ce qu’est devenue la grande puissance de l’Angleterre. Les évènemens, en se déroulant, vous donneront la clé de cette énigme. Vous verrez que plus d’une fois l’intérêt commercial a dû faire taire des considérations moins vitales.

Depuis long-temps le commissaire Lin menaçait d’une destruction totale la flotte marchande à l’ancre dans la baie d’Hong-kong. De nombreuses jonques de guerre avaient été réunies au Boca-Tigris, qui n’en est éloigné que de quelques milles, et tout faisait craindre qu’une attaque par les Chinois ne fût prochainement tentée. Le capitaine Smith, de la Volage, et M. Elliot crurent qu’il était de leur devoir de forcer le commissaire impérial à s’expliquer. La Volage, de 28, et la Hyacinthe, de 18 canons, les deux seuls navires de guerre que l’Angleterre eût à cette époque dans la rivière de Canton, mirent à la voile et s’approchèrent de la ligne ennemie. La sommation faite par le capitaine Smith à l’amiral chinois de déclarer quelles étaient ses intentions, fut renvoyée sans réponse. Le 3 novembre, on vit la flotte chinoise, composée de vingt-neuf jonques de guerre, s’avancer vers les deux navires anglais. Le capitaine Smith fit prévenir l’amiral que, s’il approchait davantage, il se verrait dans la nécessité de faire feu. L’amiral répondit qu’il avancerait comme bon lui semblerait. Un coup de canon tiré par la Volage fut rendu par quatre coups de canon partis de la flotte chinoise. Le combat s’engagea alors. Au bout d’une heure, il était terminé. Trois jonques chinoises avaient coulé, une quatrième avait sauté, plusieurs autres s’étaient jetées sur le rivage. On estime à quatre ou cinq cents hommes la perte des Chinois ; un seul homme du côté des Anglais fut légèrement blessé : facile triomphe, mais qui rendit la confiance aux navires marchands anglais. L’amiral chinois combattit, dit-on, avec la plus grande bravoure ; mais que ne peut la supériorité de la tactique européenne contre la plus complète ignorance des principes les plus simples de stratégie ! Attendez-vous, monsieur, dans la suite de cette narration, à de nombreux combats offrant tous le