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Page:Revue des Deux Mondes - 1842 - tome 30.djvu/1034

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pend entièrement de sa renonciation à toute alliance avec toute puissance à l’ouest. »

Cette insouciance dédaigneuse exposait l’Angleterre, selon le langage du Dost, « à se mordre les pouces ; » mais il est probable qu’au moment où le gouvernement de l’Inde parlait ainsi, sa détermination était déjà prise, et que l’expédition contre Dost-Mohammed était décidée. D’autres influences que celles de Burnes, d’autres considérations que celles qu’il présentait, prévalaient dans les conseils de l’Inde. Lord Auckland avait résolu d’abandonner les Barukzis, et il avait écrit à Dost-Mohammed :

« Quand à ce qui regarde Pechawir, la vérité me force à vous engager fortement à renoncer à toute idée de reprendre ce territoire… J’ai, par mon intervention, fait suspendre une guerre qui eût été ruineuse pour vous ; si vous en venez à des termes équitables avec le maharajah, vous jouirez d’une sécurité que vous n’avez pas encore connue, et du territoire que vous tenez actuellement. Vous donner d’autres espérances, ce serait vous tromper… Je n’ai pas besoin de vous dire que la nation anglaise est fidèle à ses engagemens et à sa parole. C’est pour cela que je vous écris clairement, afin que vous sachiez au juste ce que vous devez attendre de moi. Vous n’aurez pas mon appui si vous avez aucune relation avec d’autres puissances sans la sanction de notre gouvernement. Si vous voulez son amitié, il faut ne compter que sur lui et lui seul. Si vous n’étiez pas content de ce que je vous dis, et je ne puis, en justice, vous promettre davantage, ou bien si vous cherchez à vous lier avec d’autres puissances sans mon approbation, le capitaine Burnes et ceux qui l’accompagnent quitteront Caboul. »

Pourquoi le gouvernement de l’Inde se montrait-il si dur pour l’émir Barukzi, qui demandait instamment sa protection ? C’est qu’il ne croyait plus à sa stabilité, c’est que les rapports qui lui étaient adressés par d’autres agens que Burnes, lui représentaient la puissance des Barukzis comme sans fondement et sans avenir. Les frères dispersés à Caboul, à Candahar et à Pechawir, étaient en rivalité perpétuelle, quelquefois en hostilité. La question de dynastie dominait la question extérieure. Le Dost avait encore plus peur de ses frères, mahométans comme lui, que du roi de Lahore, chef des infidèles, et il exprimait à Burnes cette position avec beaucoup de bon sens et de clairvoyance. Il lui disait :

« Si Runjeet-Singh réinstallait Mohamed-Khan (son frère) à Pe-