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LE SALON.

médecin, non moins malade que sa cliente, sont restés au bout de sa brosse ?

M. Bellangé a donné aussi dans le sentimentalisme avec son Départ du Conscrit et son Retour du Soldat. Il y a du moins ici un mérite d’observation et quelque peu d’art. C’est à peine si on peut faire la même concession à la Scène de Fugitifs empruntée à Goethe par M. H. Scheffer, qui nous répète indéfiniment le même couplet de la même complainte. Le Retour du Marin et la Bénédiction des Orphelins, de M. Duval-Lecamus, sont également des pages de très bonne morale, dignes d’être mises sous les yeux de la jeunesse. J’allais oublier une petite Marguerite de M. Froment-Delormel, dont les accessoires sont finement traités, et une Corinne improvisant, de M. Simon Guérin, composition pleine de poésie, d’heureux motifs, et qui méritait d’être développée sur de plus grandes proportions.

M. Grosclaude ayant jugé à propos, cette année, d’abandonner le genre bouffon pour s’exercer, dans son Marino Faliero, à une lutte inégale avec le daguerréotype, M. Biard est resté maître de la place. C’est autour de son Mal de mer qu’ont lieu les hourras les plus expressifs de la jubilation publique. Tous ses ours, ses Lapons, ses glaces polaires, ses aurores boréales et même sa Jane Shore ne valent pas, à beaucoup près, le bon gendarme auquel les premières angoisses du mal de mer inspirent des méditations si profondes, ni surtout les deux admirables tuyaux de poële qui lui servent de bottes.

M. Biard n’a que deux compétiteurs, M. Guillemin qui fait de vrais progrès, mais dont le comique ne sera jamais ni bien varié ni bien incisif, et M. Eugène de Block d’Anvers, nom nouveau, ce nous semble, qui nous a envoyé quelques fruits de son pays. Sa Kermesse et son Intérieur de ferme sont peints avec une grande facilité et largeur de touche. Il met du caractère dans ses figures, qui ont cependant le tort d’être, en général, d’un type trop bas.

Nous avons parcouru toute l’échelle de la peinture historique et de genre. La liste est longue. Que reste-t-il au fond de ce van dont la critique rejette successivement tant de produits de mauvais aloi ? Quel est le résultat net de l’exposition ? Dans la haute peinture religieuse, un essai fortement suspect et très problématique ; deux ouvrages, distingués sans doute, mais du second ou même du troisième ordre. Dans la haute peinture d’histoire, rien. Dans la peinture de genre, trois dessins et deux tableaux microscopiques. Sept à huit œuvres surnagent donc à peine, et, sur ces sept ou huit œuvres, il n’en est même que trois ou quatre au plus qui méritent la