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Page:Revue des Deux Mondes - 1842 - tome 30.djvu/926

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ponèse ; ce furent eux qui prirent, par un dernier assaut, l’acropolis d’Athènes. L’un de ces Slaves, Botchar, né à Vodina, émigré au mont Soulion, est devenu célèbre dans toute l’Europe sous le nom grec de Botzaris.

Cette guerre héroïque aboutit à la bataille de Navarin. Alors les Russes, voyant la Turquie épuisée, commencèrent une nouvelle campagne dans le Balkan, sous le feld-maréchal Wittgenstein, dans l’été de 1828. Le succès fut balancé d’abord ; heureusement pour Mahmoud, la mauvaise saison, arrivant à l’improviste, força les Russes à lever le siége de Choumla et de Silistrie, et à repasser le Danube, abandonnant un immense matériel de guerre et semant toutes les routes de leurs cadavres. L’impassibilité des Bulgares avait maintes fois déconcerté l’armée envahissante. Ils rendaient bien dans leurs églises de solennelles actions de grace pour chaque victoire des Russes sur leurs tyrans, ils allaient même au-devant d’eux, les appelant leurs libérateurs ; mais ils refusaient de combattre dans leurs rangs. Ce n’eût été que changer de joug, et ils se sentaient instinctivement portés à attendre l’issue de la guerre, afin d’en profiter pour eux-mêmes.

En 1829, Diebitch, ayant remplacé Wittgenstein dans le commandement suprême, vengea avec éclat les échecs précédens, battit dans les défilés de Koulevtcha la forte armée de Rechid, qu’il força à s’enfermer dans Choumla, prit Silistrie par capitulation, et, laissant derrière lui, à Choumla, le grand-visir avec l’élite des Ottomans, franchit les monts sur trois points différens. Aïdos, Karnabat, Missivria, Bourgas se rendirent ; le 11 août, Slivno fut emportée d’assaut, et huit jours après les Russes étaient dans Andrinople, dont toute la population les recevait avec des cris de joie. Il semblait cette fois que les Turcs sympathisassent avec les vainqueurs plus que les Bulgares même. Ils étaient las de subir toutes les folles innovations de leur sultan-giaour (surnom de Mahmoud) ; ils préféraient presque à ce novateur musulman un giaour véritable, et, comme les proclamations de Diebitch garantissaient à tous, avec une parfaite sécurité pour les personnes et les biens, la plus entière liberté religieuse, l’action du fanatisme musulman se trouva paralysée. Les témoignages inattendus de sympathie que le peuple donna aux Russes forcèrent la Porte à capituler. Khosref-Pacha venait d’ailleurs de découvrir une conspiration qui pouvait compromettre gravement la sûreté de l’empire ; six cents membres avaient déjà été mis à mort ; le but des conjurés était d’égorger toute la famille du sultan avec les autres impies,