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Page:Revue des Deux Mondes - 1842 - tome 31.djvu/441

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TENDANCES NOUVELLES DE LA CHIMIE.

aux engrais ; avec ce fourrage élever des animaux herbivores ; avec les fumiers de ces bestiaux rendre à la terre la quantité d’azote qui lui est nécessaire pour produire les plantes qui ne tirent cet élément que de l’engrais.

M. Boussingaut a tenté la solution de ce problème par la voie de l’expérimentation directe. Il a pesé et analysé, d’un côté, les semences des plantes les plus usuelles et la quantité d’engrais nécessaire à leur culture, de l’autre, les produits obtenus, et il est arrivé aux chiffres suivans : en général, les récoltes renferment deux fois plus de carbone qu’il ne s’en trouvait dans les semences et les engrais ; le surplus a donc été tiré de l’atmosphère. La quantité d’hydrogène est également doublée. Ces mêmes récoltes présentent seulement moitié en sus de la quantité première d’azote. Ces résultats généraux souffrent des exceptions. Ainsi, dans le froment, l’azote de la récolte représente exactement celui que contenaient les semences et l’engrais. Le froment n’emprunte à l’atmosphère que du carbone, de l’hydrogène et de l’oxigène. Dans le topinambour, au contraire, la quantité de carbone fournie par les semences et l’engrais réunis est quintuplée pendant la vie de la plante ; celle de l’azote est doublée. Un hectare de terrain planté en topinambours a pris à l’air, en deux ans, treize mille kilogrammes de carbone et cent trente kilogrammes d’azote.

Certes, ces résultats sont curieux pour le savant, mais leur importance n’est pas moindre pour l’économiste. Si l’agriculture est la véritable richesse des nations, la seule qui soit à l’abri des grandes commotions politiques, on comprendra combien de telles recherches ont de valeur pour les plus puissans états. Il est évident que la culture du topinambour, d’une plante usuelle qui se nourrit en quelque sorte d’air, ne peut être que très avantageuse. L’expérience confirme d’ailleurs ici les prévisions de la théorie. Depuis quelques années, cette culture a pris en Alsace une grande extension, et il est à désirer que le reste de la France suive bientôt l’exemple d’une de nos provinces où l’agriculture est le plus avancée.

Mais pourquoi cette nécessité des engrais azotés, lorsque les plantes entourées d’air atmosphérique sont, pour ainsi dire, plongées dans un bain d’azote ? C’est que, pour être utile à la végétation, cet élément, de même que le carbone et l’hydrogène, a besoin, dans la plupart des cas, d’être uni à un autre corps. C’est à l’état d’ammoniaque, d’oxide d’ammonium, d’acide azotique, d’azotate, que l’azote pénètre dans la plante. Là il est réduit, amené à l’état d’ammonium,