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Page:Revue des Deux Mondes - 1842 - tome 32.djvu/191

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ESQUISSES DE MŒURS POLITIQUES.

LE MINISTRE.

Soit. Mais parlons un peu des affaires générales. Vous qui recevez et voyez tant de monde, vous devez savoir mieux que personne l’état de l’opinion à l’égard du ministère…

LE DÉPUTÉ.

Assez bon ; cependant… voulez-vous que je vous dise la vérité ?

LE MINISTRE.

Sans doute ; vous m’obligerez beaucoup.

LE DÉPUTÉ.

Eh bien ! on trouve généralement que le cabinet ne fait rien pour ses amis… qu’il les néglige trop. Je ne parle pas pour moi ; mais, tenez, je viens de parcourir mon arrondissement, et j’y ai trouvé du mécontentement.

LE MINISTRE.

Est-ce qu’on y blâme notre politique ?

LE DÉPUTÉ.

Pas le moins du monde ; excepté un journaliste sans abonnés et deux avocats sans cause, personne ne s’y occupe de politique.

LE MINISTRE.

Les intérêts matériels y sont-ils en souffrance ? La récolte a-t-elle été mauvaise ?

LE DÉPUTÉ.

Elle a été magnifique.

LE MINISTRE.

Le gouvernement manque-t-il à quelqu’un de ses devoirs ? L’instruction publique est-elle négligée ?

LE DÉPUTÉ.

Aucunement ; elle n’est que trop répandue. Tous ces demi-savans deviennent des raisonneurs ; on n’en peut plus venir à bout.

LE MINISTRE.

Ne s’occupe-t-on pas des routes ?

LE DÉPUTÉ.

Si fait. Il n’y a plus un petit cultivateur qui n’ait des débouchés aussi faciles que le plus gros propriétaire.

LE MINISTRE.

À la bonne heure ; voilà la vraie et bonne démocratie. Mais de quoi se plaint-on ?